26/12/2022

Pas de pays sans paysan·ne

« Sous prétexte d'une adaptation à l'économie dominante, les orientations successives des politiques agricoles, favorisant la concentration des moyens de production, ont généré des crises à répétition aux conséquences sociales désastreuses. » C'est ainsi que le site national de l'association Solidarité Paysans accueille les agriculteur·rice·s isolé·e·s et désespéré·e·s.

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Temps d'écoute 40'29''

 

Solidarité paysanne

C'est ainsi que le site national de l'association Solidarité Paysans accueille les agriculteur·rice·s isolé·e·s et désespéré'e's. La désespérance peu perceptible par l'ensemble de la société française pousse souvent les paysan·ne·s au suicide. Alors Solidarité Paysans espère agir avant l'irréversible. Un réseau de bénévoles et de salarié·e·s compétent·e·s présent·e·s dans 64 départements français, qui accompagnent tout en garantissant la discrétion et la confidentialité, l'écoute et le respect des paroles et des choix, sans jugement.
Diverses thématiques causent une souffrance difficile à surmonter : ventes aux enchères, saisies, spéculation immobilière, mépris de classe, les mésaventures de la monoculture, les pesticides, la pollution, les maladies, les ambitions de mécanisations, les engrais chimiques, la croissance forcée, délivrance par le progrès, la PAC (Politique Agricole Commune) de l'Europe, les endettements, les problèmes de transmission familiale, l'isolement terrible, le paysage institutionnel assez mafieux (institutions, FNSEA et parfois MSA) et les liens contractuels aux contraintes multiples, liens de servitude des banques, bref, la cruauté au quotidien peut être monnaie courante.

Dans ce podcast vous allez entendre trois membres de l'association, présen·e·s lors de la fête paysanne d'Azillanet à l'automne 2022. La rencontre a eu lieue après un spectacle mettant en scène le suicide d'un agriculteur.


Face aux suicides et autres souffrances des personnes humaines dont le métier est de nous nourrir, des bénévoles apportent un soutien économique, technique, juridique ou social dans la conduite et la gestion des exploitations. Ielles nous racontent leur fonctionnement, leurs épreuves et comment le courage et la force du désespoir les aident à redonner une lueur d'espoir aux héros et héroïnes du quotidien de nos champs... bénévoles et salarié·e·s de Solidarité Paysans y compris.

 

Un reportage de joy

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Liens et ressources



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Version à lire du podcast

(5364 mots) Temps de lecture : 21'
 
Joy

(Musique en fond sonore.) A partir d'une situation de fragilité, il en faut peu pour basculer dans un engrenage de difficultés qui semblent insurmontables. Et dans le monde de l'agriculture. Ces difficultés risquent de s'accumuler. Chute brutale des prix, financement inadapté, problèmes familiaux ou de santé, non-paiement de subventions, vente aux enchères, saisie, spéculation immobilière notamment parfois par la SAFER, mépris de classe, mésaventure de la monoculture. Pesticides, pollution, maladies, ambition de mécanisation non réalisables. Engrais chimiques. Croissance forcée, délivrance par un soi disant progrès, notamment celui apporté par la PAC, la politique agricole commune de l'Europe aux contraintes absurdes, endettement, isolement terrible, paysage institutionnel mafieux comme la FNSEA par exemple, lien contractuel aux contraintes multiples, lien de servitude des banques, absurdité de l'élevage. Bref, la cruauté au quotidien peut être monnaie courante envers les agriculteurs et les agricultrices. Leurs suicides chaque semaine dans le monde ne décroît pas (Musique).  Mais alors les paysans et paysannes sont ils vraiment oublié·es et abandonné·es?

Joy

Que leurs difficultés soient économiques, techniques, juridiques ou sociales, une association présente dans 64 départements de la France a décidé de donner un espoir de lueur à ces personnes désespérées du monde rural. Cette association s'appelle Solidarité paysans.

Intervenante 1

Donc on est une association de défense et d'accompagnement de paysans et paysannes en difficulté. On intervient uniquement à la demande du paysan. Ça fait partie des postulats. C'est parce que la personne demandera de l'aide qu'on ira. On ne débarque pas dans les fermes comme ça. On fait un accompagnement global aussi bien humain, qu'administratif, juridique que technique. Et toujours en binôme. C'est à dire que c'est soit deux bénévoles, soit la salariée et le bénévole qui intervient sur les fermes. On fait un accompagnement global, donc dans la durée il n'y a pas on voit pas une fois, deux fois les paysans, mais le nombre de fois qu'il faudra. Et on propose un accompagnement gratuit, c'est à dire qu'on demande juste une adhésion de 10 € par an à l'association.

Musique

Intervenante 1

On peut présenter Solidarité paysans. Donc Patrick, Laure et moi on fait tous les trois partie de Solidarité paysans. Donc Patrick est bénévole et coprésident de l'association Solidarité Paysans Aude PO . Laure est juriste à l'association Solidarité Paysans Occitanie. Et moi je suis salariée de l'association Solidarité Paysans Aude PO (Pyrennées Orientales).

Intervenante 1

Donc nous, on intervient sur l'Aude et les PO (Pyrennées Orientales).Au niveau de l'Hérault, on a une antenne et on aimerait bien structurer en association. Donc Solidarité Paysans  aussi a une antenne régionale et nationale et a 30 ans d'existence.

intervenant Patrick

Bonjour, je voulais juste rajouter quand même que au fur et à mesure des années, il y a des équipes départementales qui se forment de plus en plus et qui montent en compétences. Donc il faut rechercher les compétences chez les personnes rechercher, les futur·es bénévoles et ça personne ressource dans dans l'Hérault, aujourd'hui il y a quatre personnes en fait, pas plus qui s'occupent de Solidarité Paysans qui émerge à peine. Nous en tant que Solidarité Paysans, 11-66 On a Muriel qui a mis à disposition du 34. Je ne me rappelle plus à quelle hauteur, mais en fait l'idée ça serait d'égrener un petit peu dans tous les départements afin que toute la France soit couverte. Et ça il faut, il faut des bénévoles et du temps.

Oratrice 1

D'où est née l'initiative de Solidarité Paysans?

Intervenante 1

Alors. Historiquement, l'association est née de plusieurs courants, donc il y a eu une émanation évidemment de la Conf (confédération paysanne), mais aussi de syndicat mouvement rural... Chrétien au monde rural et aussi donc il y a eu des premières associations SOS Agriculteurs qui ont été créées. Et puis petit à petit, une identité nationale avec une vraie mission de plaidoyer.

Joy

Lors de cette rencontre à la fête paysanne d'Azillanet,vous allez aussi entendre des questions fréquemment posées à l'association Solidarité Paysans afin de lever des tabous ou des préjudices accentuant les difficultés des exploitant·es agricoles. Les bénévoles de Solidarité Paysans  répondent forts et fortes de leur expérience de terrain.

Orateur Thomas

Malgré les difficultés, ils n'ont qu'à passer en bio.

Intervenante 1

Qu'est ce que t'en penses toi ?

Orateur Thomas

C'est pas si simple...

Intervenante Laure

réponse : c'est pas si simple.

Orateur Thomas

Non mais après c'est sûr que c'est pas quelque chose qu'on a évoqué là, mais il y a cette question là de l'évolution des pratiques. En l'occurrence dans le spectacle, c'est plutôt la stigmatisation d'un passage en monoculture et on a malheureusement des exemples et un exemple assez récent d'un paysan dans l'Aude qui était en bio en vente directe (bon je vais casser l'ambiance) dans le schéma finalement, qu'on défend à la maison paysanne on va dire, et qui malheureusement est arrivé aussi à cette situation en difficulté... J'aurais du mal à dire que c'est parce qu'on passe en bio qu'on peut résoudre des difficultés. Mais en tout cas, il y a une réflexion à faire sur les pratiques et la diversification des ateliers sur les fermes pour être plus résilient. Je sais que vous travaillez là-dessus dans l'accompagnement que vous faites à solidarité paysans notamment. Enfin, je sais pas, peut être ça vous évoque des cas. Je sais pas si c'est le....

Intervenante 1

C'est pas...  Le changement de pratiques, c'est pas quelque chose qu'on va aborder dès les premiers rendez vous, quoi. Parce qu'il faut que la personne. Souvent ça fait peur aussi aux paysan·ne·s qui sont déjà dans les engueuler de remettre en question le système même s'il est bancal, et de changer de pratiques.

intervenant Patrick

Les personnes qui suivent le modèle dominant depuis des années y sont bloquées. Ils ont des contractualisations avec les coopératives et ils sont complètement bloqués. Et pour débloquer ça. Nous au départ on va travailler sur leurs besoins, leurs faiblesses, leur sortir un petit peu la tête de l'eau et ensuite on passera à la phase. Qu'est ce qu'on peut faire maintenant ensemble et comment le faire ? Et à la fin, peut être, on arrivera à remettre en cause en même temps le modèle et leurs envies  et d'arriver à aboutir sur, s'ils le veulent, parce que des fois l'arrêt c'est ce qu'il y a de mieux, à faire pour arriver à un changement de pratiques. Doucement, mais qui les mènera, mais ça c'est compliqué parce qu'il faut qu'ils dénoncent les contrats qu'ils ont avec les cadres, il faut qu'ils se remettent en question aussi, eux, leur mode de vie, leur mode de consommation. Et pour arriver  en fin de parcours, en fait, pouvoir les lâcher et qu'ils continuent sereinement dans leur exploitation.

Intervenante 1

C'est la réflexion intéressante de " Ils refusent le changement" En fait, quand quand ils ont réalisé une quelconque difficulté, il faut accepter à un moment donné, à travers votre aide et à travers le constat qu'ils viennent de faire de où ils en sont, qu'est ce qu'il est possible de changer ? Donc, à un moment donné, c'est cette phase qui doit être aussi très complexe : le changement et par quoi on commence à changer ce que tu viens d'expliquer Patrick.

Intervenante Laure

Mais le but ce n'est pas d'arriver et de tout changer, même si nous on voit que ça peut. Il y avait une psy qui racontait. T'arrives dans une ferme, tu vois, il y a un très gros tracteur, tu te dis mais il faut qu'il vende le tracteur. Mais peut être que le tracteur, c'est ce qui le maintient encore debout quoi. Donc aussi, aller doucement là dedans quoi, Ce qui nous, nous paraît évident, peut tenir l'autre encore debout parce que s'il vend le tracteur, le voisin va voir qu'il est en difficulté. Et voilà donc y aller tranquillement quoi.

Intervenante 1

Et nous, on ne fait pas à la place de on fait avec. En fait, on ne va pas prendre des décisions pour l'agri. Mais c'est lui qui va prendre les décisions et ça peut aller. Comme Patrick disait un arrêt de l'exploitation par exemple. Ou pas. Et puis le modèle économique du bio est pas forcément facile. Je sais qu'il y a quand même des transitions qui sont assez longues en fait dans la pratique culturale, et on voit les aides aussi qui s'amenuisent. Les circuits de diffusion sont pas non plus hyper tracés. Donc du coup c'est pas forcément. Et puis encore une fois, nous on essaie de s'abstenir de juger aussi car l'idée c'est déjà d'appréhender toutes les difficultés. Et donc on souvent en fait des montants de dettes quand même assez impressionnant vraiment en fait de nuances de. D'autres questions qui se posent dans l'immédiat, et c'est plutôt la question du soutien en fait qui va permettre à la personne de s'asseoir sur une chaise de sortir à tout ce qu'elle a vécue. Ça peut être 20 ans de procédures, ça peut être le poids familial de séparation, euh, le déni aussi. Donc il y a tout ça en fait à aborder pour en arriver aux questions technico administratives, les procédures, et cetera, Et on n'arrive pas avec "ah bah c'est une super idée, l'agroécologie, vous connaissez ?" Enfin oui, ce sont des très bonnes idées, mais c'est pas ça. Enfin voilà, c'est assez délicat. Après il y a des parallèles quand même. Une. Une dimension de l'accompagnement qui oriente vers l'agroécologie. Une étude qui est parue sur justement des transitions qui ont réussies. On a la volonté d'organiser des groupes de parole où justement entre entre les paysans, en particulier sur l'agroécologie, et aussi pour voir entre justement ce qui pourrait changer sur ces pratiques là et avoir des groupes de parole entre paysans, c'est quand même déjà un truc. C'est pas évident en fait. Déjà, ni à les mobiliser, ce sont  des personnes qui sont souvent très isolées en fait. Alors moi je ne travaille que depuis deux ans pour Solidarité Paysans, je ne viens pas pas du tout de ce milieu là. Je découvre des vies quand même très particulières. Et encore une fois, un paysage institutionnel et des contraintes vraiment terribles. En fait, une fois que vous avez du monde associatif, économie sociale, solidaire, forcément, le bio, les marchés courts, enfin les circuits courts, les AMAP et tout ça c'est des solutions d'avenir. On se rend compte rapidement qu'en fait là, on est quand même sur des dimensions qui sont pas abordables par ces petites solutions là, qu'on a vraiment besoin de recontextualiser tout ça, de repolitiser tout ça en profondeur et de recréer des liens durables.

Joy

Là vous soulevez plein de problèmes systémiques. Quels leviers faudrait soulever pour qu'il y ait moins de maltraitance au niveau du monde paysan?

intervenant Patrick

Il faut casser le modèle.

Joy

Comment ?

intervenant Patrick

Moi je voulais juste revenir à une fierté quand même qu'on a, c'est qu'au niveau national, on a une statistique où 70 % des accompagnements sont maintenus, les exploitations sont maintenues. Ça, on peut le faire. Même si je dis que parfois, arrêter c'est une solution parce qu'il y en a pas d'autres et parce que c'est c'est, c'est décidé, clairement. Enfin voilà. Mais 70 % par rapport à d'autres, si on parle du niveau institutionnel ou chambres d'agriculture ou quoi que ce soit, il y a pratiquement personne qui se bouge pour les agriculteur·rices en difficulté. C'est comme ça que nous on les, on les reçoit, ils sont généralement, ils sont au bout et on a à traiter non seulement l'urgence, mais l'urgence alimentaire, souvent, humaine par la suite. Enfin en même temps quoi. Et mais personne ne le fait; quand qu'on essaye d'appeler SOS suicide. Et presque ils vous donnent la corde...Peut être c'est des leviers comme ça qui faudraient actionner. On essaie aujourd'hui de rentrer dans les cellules, les futures cellules, les cellules actuelles, de mal être agricole où on se rend compte que les seules personnes pouvant et voulant faire de l'accompagnement global, bin il reste plus que nous, les autres, ils sont là pour pour se servir et se servir financièrement s'il reste quelque chose, se servir humainement parce qu'ils en ont rien à foutre des suicides. Euh enfin voilà. Donc peut être ce modèle là, politiquement, on ira dans la défense. Mais syndicalement, je pense que la Confédération paysanne peut se saisir de l'opportunité de la nouvelle cellule qui va être créée, qui est en train de se créer là aujourd'hui de mal être agricole pour influencer justement le côté politique. Nous, on a du mal à influencer les politiques au niveau départementaux, départementales et régionales parce que parce qu'on n'a pas de quoi. Donc ils aimeraient bien même qu'on en ait encore moins. Mais ils nous cachent un petit peu, donc je ne sais pas quel levier.

Joy

Comment ils font pour vous cacher ?

Intervenante 1

On a des difficultés de financement de nos actions. Après au niveau national, il y a quand même une grosse volonté de plaidoyer, d'intervention dans la constitution d'un texte de loi pour remplacer l'agriculteur·rice. Là, en ce moment justement, il y a une une énième réforme de la justice qui est en cours avec tout ce qui est procédures collectives de sauvegarde, redressement, liquidation, pour les agriculteurs qui normalement restent au tribunal judiciaire et pas au tribunal de commerce. Donc c'est un juge professionnel et non pas un juge aigu parmi les professionnels. Et là il va le refaire à nouveau. Un tribunal des affaires économiques avec des juges élu·e·s parmi des professionnel·le·s de l'agriculteur. Donc en gros on se retrouve face aux représentants des créanciers. Donc c'est voilà. Donc en fait, l'idée c'est justement de prioriser à chaque fois, réaffirmer la protection justement au niveau de ces procédures là, de maintenir les agriculteur·rice·s devant des juges professionnel·le·s et non pas des juges élus au sein de la profession qui vont enfin avoir les mêmes logiques auxquelles ils sont confrontés tout le temps. Donc voilà, il y a un gros travail de plaidoyer. Après, les leviers vraiment politiques. Je pense que cela va beaucoup plus loin. En fait, c'est pas tant en revendications. Je pense que c'est vraiment la repolitisation de tout un chacun, même les non-agriculteurs. On a eu comme Monsieur Macron, qui, à l'ouverture du confinement, vous a dit Ouh là là, la situation est grave, on se rend compte quand même qu'on a des productions qui sont complètement éclatées qu'on dépend du marché international. AH bon ?!! Après, on va faire quelque chose ou un gros discours hypocrite. Mais là on voit aussi que la FNSEA et la MSA s'emparent de la souveraineté alimentaire. Donc là, en ce moment, il y a plein d'élu·es MSA qui interviennent sur la période début octobre auprès de banques alimentaires, dans les lycées agricoles, sur la souveraineté alimentaire. Là on parle pas de souveraineté alimentaire, mais on parle d'autonomie en fait, mais réellement pas seulement alimentaire, de l'autonomie dans la production. Et l'idée aussi en termes de levier politique, c'est d'être un peu concerné·e·s sur ces questions politiques là , d'apprendre et de se réunir en collectif et de reprendre un petit peu toutes ces questions là pour en rediscuter ensemble, mais je vous apprends rien à la conf ! En gros, il faut que ce soit beaucoup plus large. ça prend du temps et ça prend de l'énergie, mais ça c'est aussi salvateur en fait, c'est comme ça que se battre contre des moulins à vent, c'est très énergivore. Faut relire "l'art de la guerre" de Sun Tzu prendre un peu de recul et se dire : y a quand même des stratégies à avoir, on peut en parler ?

Orateur Pascal

Moi j'ai deux questions sur le spectacle. Une sur le chiffre de la fin du 1 suicide par jourdans le spectacle... Dans le spectacle c'est l'exemple de quelqu'un qui, à priori a perdu son travail. Est ce qu'il est encore considéré comme paysan s'il se suicider ? Est ce que c'est encore compté dans les chiffres ou pas ? Ou est ce que c'est que les personnes en activité et pas les personnes qui se retrouvent au chômage ? ou.... Ou est ce que le chiffre peut être doublé ?

Intervenante 1

Le chiffre de un suicide par jour date de 2015. On pense que tous les suicides ne sont pas comptabilisés parce qu'en fait l'assurance "décès invalidité" ne marche pas en cas de suicide. Donc il y a certain·es paysan·ne·s qui ont des accidents du travail qui en fait sont des suicides, mais pour protéger leur famille. Voilà, ça fait encore partie des choses bien glauques du milieu. De la situation. Donc voilà, ce chiffre, il n'a pas été remis à jour, mais c'est le chiffre un peu phare de 2015 quoi. Certainement en deçà de ce qui est réellement à propos des problèmes personnels.

Oratrice X

Vous accompagnez combien de personnes ?

Intervenante 1

Alors nous, au niveau de Aude PO, par an, on accompagne à peu près 30 personnes. Voilà, tu as des accompagnements qui vont durer plusieurs années et d'autres en deux trois fois. Tu as juste un peu un besoin à un moment... En moyenne, c'est une trentaine de personnes. Et je voulais rebondir aussi par rapport à la spécificité du monde agricole aussi. C'est un des isolements aussi des paysan·ne·s, c'est que.... la MSA c'est à la fois leur caisse d'assurance et à la fois ils sont créancier·e·s. Donc quand on arrive,  souvent, la MSA met en avant que oui, mais nous on fait tout pour les paysan·ne·s, il y a le RSA, il y a, il y a les dons,  tout ça. Mais seulement le paysan·ne n'ose pas, comme il est créancier, aller se tourner vers la MSA. Donc nous souvent, on sert aussi de médiateur et on rencontre aussi de belles personnes à la MSA, notamment les assistantes sociales qui elles, sont au contact des gens. Et là on arrive à avoir des leviers quoi. Mais la MSA va nous dire nous, Solidarité Paysans, mais nous votre travaille on le fait !  et bien non parce que les agri activent pas du tout ce levier là.

Oratrice Mathilde

Du coup, ça me fait me questionner sur votre plan de communication et comment vous sensibiliser les agriculteur·rices ? Et ma question c'est aussi est ce que du coup ils viennent pas à Solidarité Paysans quand c'est trop tard ? Voilà comment faire.

Intervenante 1

Mais alors plan de com euh... Ça nous pose la question aussi. Parce que moi je veux te parler d'Aude PO, il y a notre asso, là on commence à faire des affiches et tout ça. Après nous on est peu de bénévoles dans l'association donc on a aussi peur de communiquer trop et de pas pouvoir répondre à toute la demande. Et après, c'était quoi la deuxième question  ? Et souvent, oui, souvent, c'est jamais trop tard. Mais souvent on arrive dans des situations où si on avait pu accompagner quelques mois avant, ça aurait été, ça aurait été bien. Ouais ouais.

intervenant Patrick

Moi je suis à la solidarité de paysans depuis 2011, douze ans de plus. Mais on a toujours, on s'est toujours mis des freins. On était chapeautés par LR, la région Languedoc-Roussillon et on s'est mis. On a eu très peur de créer l'association Aude-PO départemental pour coller à la MSA. En fait, on l'a fait. On s'est fait un petit peu peur, submergé·e·s par les appels et on s'est dit ben qu'est ce qu'on fait ? La phase d'après, ça a été d'embaucher Muriel. La phase suivante, c'est de trouver des bénévoles et la phase d'après, c'est de communiquer auprès du grand public et des agriculteurs. Mais on en fait quand on est actif, des fois ....

Orateur Thomas

Est ce que tu peux nous dire un peu c'est quoi être bénévole à solidarité paysans ? Concrètement ?

intervenant Patrick

Alors bénévole ? Moi je le vois de plusieurs manières. On peut être ce qu'on appelle personne ressource, c'est à dire juste juste pas faire de l'accompagnement auprès des agriculteurs et agricultrices, mais juste mettre au service de l'association, soit comptablement, soit peu importe, ça peut être une chose. Après on peut avoir des référent·e·s par production, des référents par production, après pour être bénévole et faire de l'accompagnement sur le terrain, on demande toujours à ce qu'on ait une certaine formation formation d'écoute, formation juridique, formation. On fait plein de formations et nous on en fait encore. Ça c'est pour suivre au mieux et se protéger aussi nous. ça, c'est pour faire des accompagnements en binômes chez les personnes au bureau maintenant qu'on a un bureau, après tout ce qui est représentativité, c'est les coprésidents et la présidentes qui le feront. Donc l'accompagnement, il y a deux stades. Après il peut y avoir un troisième stade, c'est peut être la recherche de financements ou la communication, on va dire, Mais tout ça, ça se travaille, on est en train de le travailler. Après, on s'oblige, nous en tant que accompagnateur sur le terrain, on s'oblige aussi à des relectures de pratiques collectives, c'est à dire avec toute l'équipe et aussi des temps, des journées entières, avec en l'occurrence un·e psychothérapeute qui nous apprend non seulement à se protéger et à déballer aussi peut être des fois ce qu'on a de trop lourd emmagasiné et comment se comporter et analyser des situations au cas par cas si on en a besoin.

Orateur Thomas

Juste pour bien comprendre qu'on peut arriver à Solidarité Paysans sans forcément avoir de formation ou de compétences particulières, mais une appétence pour accompagner. Et il y a des formations initiales en tant que bénévole plus d'autres que vous faites tout au long de...

Intervenante 1

à savoir que les premiers accompagnements que tu feras, Thomas, si tu veux devenir bénévole, il sera là.

Manu

Il a plus le temps !

Intervenante 1

Mais souvent c'est en trinôme aussi pour les personnes nouvelles. Il y a toute cette batterie de formations que Patrick dont Patrick a parlé. Et après, tout le monde a des compétences donc bienvenue.

Joy

Et une personne qui veut devenir bénévole, elle fait comment ? Il y a un site?

Intervenante 1

Il y a un site : Solidaritepaysans.org  ; Après nous aussi ça dépend de là où tu habites et sur le site est répertorié toutes les associations. Voilà, donc on a deux types de plaquettes. On a les plaquettes qui sont plus à destination des paysans paysannes en difficulté et des plaquettes qui sont plus à destination des partenaires.

intervenant Patrick

Alors je voulais aussi remercier chaleureusement le département d'un large financement qu'il nous octroie.

Orateur Thomas

Dans quel département ? l'Hérault ? l'Aude

intervenant Patrick

De l'Aude.

Intervenante 1

En ce moment, les associations sont éligibles au mécénat aussi. Donc vous pouvez faire des dons défiscalisés, mais vous pouvez faire aussi des dons sans demander de réduction d'impôt. Voilà, toute association peut recevoir des dons sans, sans forcément être éligible au mécénat. Mais voilà, après si vous voulez être bénévole, vous pouvez nous laisser vos coordonnées. On vous recontacte. Et on voit comment ça peut se passer petit à petit, autant par la pratique des accompagnements, par les formations.

 

Musique "On m'a conté que les plantes voyagent sans redevances."

 

Orateur Pascal

En tout cas au niveau des aides. Moi j'ai l'impression qu'il y a beaucoup d'agriculteurs qui y vivent parce qu'il y a des aides et qui pourraient pas vivre sans. Donc le Problème, c'est le fonctionnement global. Mais est ce que. Est ce que ce serait pas une solution juste que tous les agriculteur·rices soient subventionné·e·s et ne travaillent pas pour gagner de l'argent mais travaillent parce que c'est utile ? Je sais pas, il y a peut être d'autres solutions à trouver.

Intervenante 1

Alors sachant que le modèle économique, il y en a la moitié qui ont des revenus négatifs avant subventions et même avec les subventions, apparemment il y a encore 15 % qui ont des revenus négatifs. C'est vrai que ça pose vraiment problème sur le modèle économique. Par exemple, j'accompagnais un maraîcher, alors lui il était sur courgettes, il avait trois productions sous serres, il vendait dans une centrale pour le marché de gros. Donc bon, c'est hyper classique, il sort quand même. Donc on est sur la période d'observation dans les procédures collectives, on a un arrêt de toutes les dettes, on fige la situation. La personne a une période pendant laquelle elle va pouvoir produire tranquillement sans avoir à rembourser toutes les dettes passées. Donc c'est là qu'on voit en fait justement comment se passe l'activité. Et donc au bout de quatre mois, non six mois, il sort quand même 35 tonnes, ce qui n'est pas rien en trois mois et. Et on regarde les chiffres et en fait on voit que les courgettes , il les vend à moitié prix que l'année passée on se dit bah c'est quoi ? les produits espagnols ! Ben oui, tout simplement. Donc qu'est ce qu'on fait ? On s'oriente directement vers une motivation. Il en a marre en disant qu'il qui cravache. Et donc oui, en effet, le modèle économique est à remettre en question et de manière beaucoup plus large. Quels sont les choix sociaux ? Quelles sont, après les solutions, vers une socialisation complète de la production ? Je sais pas, il y en a qui ont essayé, qui sont allés vers une socialisation aussi de la production qui sur l'ultra mécanisation, sur ce que signifie ... ce Que c'est réellement. Enfin voilà, ça, ça dépend vraiment comment ça se décline concrètement. Je suis pas sûre qu'une socialisation massive d'autorité soit vraiment la solution.

intervenant Patrick

Pour revenir vite fait sur les aides de la PAC,  je pense d'une part les consommateurs comme ceux qui connaissent pas en vrai les aides de la PAC, au départ c'était une aide intéressante pour pallier la concurrence et les problèmes après-guerres. Aujourd'hui c'est ça, c'est devenu une aide, pas pour tous les agriculteurs. Déjà il y a beaucoup de filières qui sont qui sont hors PAC. Tout ce qui est fruits et légumes, euh il y a plusieurs filières qui touchent pas d'aide PAC qui sont obligées de travailler deux fois plus qu'un éleveur. Oui, mais je suis désolé, c'est un peu comme ça. Mais après quand on voit les montants des PAC et on peut être choqué·e·s des montants versés aux agriculteur·rice·s. Mais moi je préfère être choqué des montants versés à l'agrobusiness et aux gros groupes comme La Cavale ou d'autres qui touchent de la PAC. C'est un zéro de plus qu'un agriculteur sur les chiffres, donc ça demande une réflexion, mais je pense que c'est pas c'est pas le nœud du problème le vrai problème aujourd'hui et il va être de plus en plus c'est et on en a peur. C'est le climat, le climat, le bio qui chute, les circuits courts qui chutent. Et tout ça, ça ne va pas aider des agriculteur·rice·s aujourd'hui.

Intervenante 1

On est sur la problématique de l'importance des répartitions de la richesse.

Manu

On a rencontré quelqu'un qui travaille au COVALDEM11, qui s'intéresse au volume de déchets et en fait, les gens ont moins d'argent, mais en fait, c'est une personne du Colvaldem qui  témoignait que le volume des déchets avant le confinement baissait tout doucement depuis plusieurs années grâce aux politiques de sensibilisation, tout ça. Au moment du confinement, ça a beaucoup baissé le volume des déchets parce qu'on achetait moins de trucs avec les magasins fermés. Et en fait, après la fin du confinement, les gens se sont remis à acheter, mais pas de la bouffe, plein d'autres choses. Et le volume des déchets est reparti de façon vertigineuse. En fait, sur l'électroménager, les trucs de merde, la production industrielle, la surproduction, débile quoi. Donc il y a pas qu'un problème d'argent. C'est où on met son argent ?

Confédération Paysanne Olivier

Oui, c'est tout à fait juste. Et d'ailleurs c'est ça la question de l'achat, de l'alimentation, de l'alimentation, elle est devenue une variable d'ajustement. C'est à dire que quand les gens ont de moins en moins d'argent, les loyers bougent pas. Au contraire, ils augmentent. Tous les biens de consommation augmentent. En plus, on a créé des nouveaux, des nouveaux moyens, les abonnements aux téléphones portables, internet et cetera, donc qui ont amené des charges supplémentaires dans les foyers. Et toutes ces charges sont devenues incompressibles. Donc du coup, quand les gens ont moins d'argent, et bien ils vont se diriger vers une alimentation de meilleur marché parce qu'en fait c'est le seul. Pour eux, c'est le seul, c'est la seule variable d'ajustement qu'ils ont trouvé quoi. Donc on va se retrouver à acheter des produits qui viennent de pays où les aliments sont produits à bas coûts. C'est pour ça notamment que la Confédération paysanne milite pour un prix minimum d'entrée. C'est à dire qu'elle voudrait que des que les produits qui viennent d'Espagne ou autres, qu'on prenne en compte en fait le coût de production des produits en France et que ces produits ne puissent pas rentrer sur des coûts inférieurs aux coûts de production français. Mais ça, c'est dans un monde libéral, ça va être compliqué à mettre en place. L'argent il reviendrait... enfin de pouvoir stabiliser les prix et qu'il y ait moins de différence de prix entre la production française et la production étrangère. Et puis c'est aussi le fait que ça pourrait permettre en fait aussi de favoriser sur le plan social la production espagnole, et cetera, parce que c'est un mécanisme qui permettrait aussi, qui n'est pas, qui n'est pas franco français, qui n'est pas uniquement protecteur pour les agriculteur·rice·s français·es, mais qui permettrait de favoriser les conditions sociales des petits travailleurs agricoles des pays à bas coûts. C'est l'heure de l'apéro c'est ça !

Musique Fin

chanson anglophone sur les légumes et la permaculture .

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...

Pour comprendre et penser plus loin :

En nous interessant davantage aux conditions de vie des paysan·nes, nous saurons contribuer à leur mieux être en accompagnant en particulier leur transition vers le tout végétal.

https://www.letemps.ch/societe/transfarmation-eleveurs-secartent-lexploitation-animale

https://planetezerodechet.fr/suisse-paysans-vegans-se-convertir-a-une-agriculture-vegan/

La formation de paysans à paysans, une des clés actuelles de la transition agroécologique ? : https://www.cairn.info/revue-pour-2018-2-page-193.htm