Nous avons rencontré Alix lors de l’Université de la Libération Animale. Face à face dans notre studio mobile, Alix nous a livré un témoignage touchant sur le trouble bipolaire qu’on vient de lui diagnostiquer. Elle aborde ce sujet avec beaucoup de rigueur et de pédagogie. Elle souhaite aider ainsi celleux qui n’osent pas verbaliser mais aussi leurs proches qui sont désarmé·es face à la maladie.
Temps d'écoute : 80'51''
L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a classé les troubles bipolaires parmi les 10 pathologies les plus invalidantes. En France, ce sont entre 1% et 2,5% de la population qui serait touchée, ce pourcentage étant certainement sous évalué. C’est un sujet de santé publique important parce que c’est souvent jeune que le diagnostic est posé et le suicide est un risque majeur pour les personnes subissant ce trouble. Entre des phases UP et Down, il est important d’être accompagné·e au plus tôt pour mettre en place un traitement de stabilisation de l’humeur. Lorsque les équipes médicales sont sollicitées au plus tôt, cela permet un temps de coopération primordial entre les médecins et les patient·es pour une prise en charge efficace. Avec un maximum de chance de stabilisation.
Alix à plusieurs reprises, qualifie de Warriors certaines personnes bipolaires dont elle connait l’histoire. C’est que ce trouble est un parcours de combattant·es à la recherche d’une vie plus sereine inscrite dans la réalité et que c’est avec courage et persévérance que se mène ce combat.
Voici le témoignage d’Alix, pour mieux se comprendre et mieux s’accompagner mutuellement que l’on soit malade ou proches de malades.
Un entretien réalisé par Martha
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14000 mots / 56min de lecture
Musique
Martha:
Nous avons rencontré Alix lors de l'Université de la libération animale. Face à face dans notre studio mobile, alix nous a livré un témoignage touchant sur le trouble bipolaire qu'on vient de lui diagnostiquer. Elle aborde ce sujet avec beaucoup de rigueur et de pédagogie. Elle souhaite ainsi aider celleux qui n'osent pas verbaliser, mais aussi leurs proches qui sont désarmé·es face à la maladie. L'Organisation mondiale de la santé, l'OMS, a classé les troubles bipolaires parmi les dix pathologies les plus invalidantes. En France, ce sont entre 1 % et 2,5 % de la population qui seraient touchés. Ce pourcentage étant certainement sous-évalué. C'est un sujet de santé publique important parce que c'est souvent jeune que le diagnostic est posé et le suicide est un risque majeur pour les personnes subissant ce trouble. Entre des phases up et down, il est important d'être accompagné·e au plus tôt pour mettre en place un traitement de stabilisation de l'humeur. Lorsque les équipes médicales sont sollicitées au plus tôt, cela permet un temps de coopération primordial entre les médecins et les patients ou patientes pour une prise en charge efficace avec un maximum de chances de stabilisation. Alix, à plusieurs reprises dans ce témoignage, qualifie de warrior certaines personnes bipolaires dont elle connait l'histoire. C'est que ce trouble est un parcours de combattant combattante à la recherche d'une vie plus sereine, inscrite dans la réalité et que c'est avec courage et persévérance que se mène ce combat. Voici le témoignage d'Alix pour mieux se comprendre et mieux s'accompagner mutuellement. Que l'on soit malade ou proches de malade.
Martha:
Bonjour Alix.
Alix:
Bonjour...
Martha:
Alix, on se rencontre aujourd'hui parce que tu vas nous parler d'une chose essentielle pour toi et peut être pour les auditeur·ices qui écoutent ce podcast. On va parler d'un sujet qui peut être Trigger aussi pour certaines personnes.
Alix:
Absolument oui.
Martha:
Donc on va parler de bipolarité, on l'indique tout de suite. Alors d'abord, qui es tu? Alix...
Alix:
Alors je suis une personne blanche issue de classe moyenne et je dirais toujours dans la classe moyenne. J'ai 34 ans, je suis dans une situation confortable, je me dirige vers un peu plus de précarité parce que je suis en train de faire une transition professionnelle vers le milieu artistique. Qu'est ce que je peux dire d'autre ? Oui, bon, je suis également... ce qui m'attire dans la vie, c'est le militantisme. J'essaie de faire ça dans une optique de convergence des luttes, avec un accent notamment sur l'antispécisme.
Martha:
L'antispécisme et du coup la convergence... ?
Alix:
Ah oui, du coup, je suis sensible à toutes les luttes. En réalité, il y a cette frustration de ne pas pouvoir lutter sur tout. Si je pouvais, je le ferais. (Rires)
Martha:
Ok. Tu as demandé à avoir... à ce qu'on se rencontre aujourd'hui. Alors tu as demandé à ce qu'on se rencontre pourquoi? Pourquoi c'est important pour toi d'être à ce micro à cet instant ?
Alix:
Bien, je dirais pour deux raisons, peut-être... Il y a peut être une raison mégalo où j'ai envie d'expliquer mon parcours. Et la seconde raison, en réalité c'est la raison principale, c'est que je trouve que la bipolarité est très mal comprise et je le constate quand je dis autour de moi que je suis bipolaire. Et c'est assez embêtant du coup de devoir se définir à chaque fois. Je ne suis pas sûre que ma propre famille ait bien cerné ce que c'était. Certains membres de ma famille si, mais peut être pas tous et toutes.
Martha:
Alors donc aujourd'hui, si on parle de la bipolarité, c'est parce que toi tu sais aujourd'hui que tu es bipolaire. Comment tu as su que tu étais bipolaire ? Comment ça commence ?
Alix:
Et bien je reviendrai là dessus quand j'expliquerai mon parcours. Mais grosso modo, tout d'un coup, je me suis retrouvée... Tout d'un coup, j'ai fait une tentative de suicide qui était inattendue. J'en avais jamais fait avant et je me suis retrouvée cinq semaines à l'hôpital psychiatrique, ce qui était la première fois de ma vie également. Et là on m'a dit "c'est absolument certain, t'es bipolaire, t'es en état mixte." Je définirais l'état mixte plus tard parce que ça, ça nécessite d'expliquer un peu quel... Enfin ça nécessite d'expliquer quelques bases théoriques.
Martha:
Donc ça veut dire que c'est à l'hôpital psychiatrique que tu découvres...
Alix:
Oui
Martha:
Qu'on te pose un diagnostic.
Alix:
Oui, c'est exactement ça.
Martha:
Et au moment où on te pose ce diagnostic, il se passe quoi pour toi ?
Alix:
Et bien je t'avouerai que je me rappelle très peu de la période de l'hôpital psychiatrique parce que j'étais dans un état qui comprenait de la manie j'expliquerai tout à l'heure ce que c'est... Et dans ces cas là, la seule solution pour que tu puisses survivre, en tout cas dans mon cas, c'était le cas, c'est qu'on me bourre de médicaments et avec mon consentement, et iel avait tout à fait raison de faire ça.
Martha:
Ok. Alors peut être que pour commencer, on va entendre ta définition de la bipolarité.
Alix:
Oui
Martha:
Je rappelle ici à ce micro qu'on n'est pas en train, nous, de parler en tant que spécialistes-istes-istes-istes. Mais comme on parle d'un vécu et c'est ça qui compte, on est sur un témoignage.
Alix:
Oui
Martha:
Donc, c'est la raison pour laquelle si vous vous entendez dans la définition, de la bipolarité, selon toi, quelque chose qui ne correspond pas à ce que vous, vous savez... Ce qui compte, c'est la parole d'Alix qui est actuellement à ce micro.
Alix:
Tout à fait. Alors après, j'ai beaucoup lu sur le sujet. Néanmoins, effectivement. Il se peut que je dise des bêtises ou qu'une personne bipolaire ou une personne de l'entourage d'une personne bipolaire pourrait se dire "je me trompe", je ne vais pas dire que je connais non plus parfaitement le sujet.
Martha:
Donc il ne s'agit pas de bêtise, mais il s'agit d'une définition que tu as voulu, toi, nous donner. C'est laquelle ?
Alix:
Alors la bipolarité c'est un trouble de l'humeur qui consiste à avoir des phases, des phases up, c'est à dire des humeurs très bonnes/trop bonnes et par alternance avec des phases down qui sont des phases de mauvaise humeur. Mais vous allez comprendre que c'est pas comme les gens non bipolaires qui disent : "aujourd'hui je suis de bonne humeur, aujourd'hui je suis de mauvaise humeur."
C'est un handicap psychique qui a été classé par l'OMS, l'Organisation Mondiale de la Santé, comme l'une des 10 maladies les plus difficiles à traiter, les plus difficiles à vivre en fait, pardon, pas à traiter mais à vivre. Alors désolée, j'utilise des fois troubles psychiques, des fois handicap, des fois maladie, c'est un peu le vocable qui me vient de manière spontanée. Je sais pas quel serait le terme exact à utiliser pour ne troubler personne. Donc, je m'excuse par avance. Si c'est maladroit
Martha:
On va peut être, moins s'excuser que dire: "ben voilà, c'est aussi la manière dont tu vis les choses qui fait que tu utilises ces mots là."
Alix:
Oui. Tout à fait. Merci, ça déculpabilise
Martha:
Oui, oui, c'est important. On est vraiment et on le rappelle sur l'idée d'un témoignage et on continue alors. Tu voulais me dire trop bonnes, les UP ?
Alix:
Oui alors. Classiquement on fait un petit graphique pour expliquer la bipolarité, sauf qu'on est à la radio. Donc je vais vous demander de faire appel à votre imagination. Vous prenez une feuille à carreaux et vous tracez une ligne. Sur cette ligne, vous faites des petites vagues vers le haut, vers le bas, qui vont s'étaler seulement sur un carreau dessus un carreau en dessous. Et bien ces petites vagues, c'est les humeurs des personnes non-bipolaires. C'est les personnes qui vont dire "je suis de bonne humeur en ce moment" "je suis de mauvaise humeur en ce moment" "Cette semaine, je suis en train de faire ma lune de miel, du coup je suis tout le temps de bonne humeur" et évidemment, il y a des périodes difficiles donc on va plutôt faire la vague vers le bas. Maintenant, les personnes qui ne sont pas bipolaires peuvent aussi avoir une plus grosse vague vers le bas, qu'on appelle évidemment la dépression. Donc la dépression, on va la situer environ deux carreaux en dessous de la ligne. Euh... Bien sûr, ça va varier d'une personne à l'autre...
Martha:
Oui, les ressentis varient.
Alix:
Oui voilà exactement ! Ce que j'explique, c'est le schéma classique. Maintenant on est d'accord que c'est pas quelque chose de mathématique, mais ça donne une idée. Donc là je vous ai dit ce qui se passe chez les personnes non-bipolaires et maintenant je vais vous expliquer les trois états thymiques, c'est l'humeur, les trois états thymiques spécifiques aux personnes bipolaires. Et là on entre dans la galère. Enfin, non, la dépression, c'est déjà la galère. (Rires) Alors en dessous de la dépression, on va avoir un état encore plus difficile à vivre qui s'appelle la mélancolie profonde. Donc là, on passe de deux carreaux en dessous de la ligne à quatre carreaux. Donc c'est vraiment un état de dépression profonde, profonde, profonde. Je saurais pas la définir parce que je ne suis pas sûre d'y avoir été, je suis pas certaine, les médecins sont pas capables de dire... On peut dire "t'y tends..." Moi on m'a dit que j'y tendais, je suis pas certaine... Euh voilà. Donc ça c'est la mélancolie profonde. Maintenant on va s'intéresser à ce qui se passe au dessus de la ligne et là c'est tout à fait spécifique aux personnes bipolaires. On va avoir l'état d'hypomanie, donc là on est deux carreaux au dessus de la ligne, mais après il y aura l'état de manie c'est quatre carreaux au dessus de la ligne. L'hypomanie c'est pas si grave parce que l'entourage va pas forcément voir qu'on est en hypomanie. Ça peut se voir, parce qu'en général on parle beaucoup beaucoup beaucoup, la logorrhée verbale... Et on peut avoir une certaine exubérance, ce qui peut être fatigant, mais donc ça peut quand même...
Martha:
C'est fatigant pour la personne qui le vit ?
Alix:
Non! C'est fatigant pour l'entourage. Parce que si je la ramène tout le temps que je... Je parle avec exubérance d'un milliard de sujets, je peux aussi avoir une certaine arrogance, c'est fatigant pour l'entourage. En hypomanie, souvent, on a une libido très très très élevée. Et comme on a une logorrhée verbale, une exubérance, on peut du coup être amené à parler tout le temps de sexe, ce qui peut également être fatigant. Si vous avez une personne asexuelle autour de vous, ça peut également, ou d'autres cas d'ailleurs de sensibilité à chacun chacune, et bien ça peut aussi provoquer de la gêne, en fait, ça peut heurter. Voilà, c'est ça que je voulais dire, ça peut heurter les personnes de notre entourage.
Martha:
Ce qui veut dire que par exemple, dans cet état d'hypomanie, on pourrait avoir de la difficulté à socialiser, simplement parce qu'on est trop socialisé·e en fait.
Alix:
Exactement ! C'est ça. Ça peut également poser problème dans la vie professionnelle. Imaginez, vous êtes en phase d'hypomanie en réunion de travail qui serait une réunion de travail pas du tout chill, mais quelque chose de très sérieux dans une entreprise très rigide. Ça peut être complexe. En hypomanie également, on peut dépenser beaucoup, beaucoup d'argent. Peut être même de l'argent qu'on n'a pas et en manie, ça, ce sera exacerbé. En manie, j'y reviendrai mais on peut dire "Tiens! Je m'achète un deuxième appart!" Je vais m'endetter jusqu'au cou quoi. "Mon business croule, c'est pas grave, je vais lancer une chaîne, je vais faire... Je m'achète un deuxième restaurant."
Martha:
En fait, c'est un peu comme si on n'avait plus de limites émotionnelles qui nous alerteraient de l'endroit où on va. On n'a plus d'alerte en fait.
Alix:
Oui, oui, tout à fait. Oui oui, c'est ça. Euh je crois que j'ai dit le principal sur l'hypomanie, j'oublie sûrement des choses... Attendez, je vais vérifier mes petites notes... Oui ! On a du mal à se concentrer aussi. Ah oui! Et on dort moins. Je parle toujours de l'hypomanie là ! Alors on dort moins pour la simple raison que on adore sa vie, en général, quand on est en hypomanie. On se sent bien en hypomanie! On n'a pas envie d'aller à l'hôpital psychiatrique, en général, parce qu'on se sent très bien. Voilà. Du coup, on n'a pas envie d'aller dormir. On dit qu'une personne en hypomanie dort en moyenne 3h parce qu'elle est pleine d'énergie. Alors comme elle est pleine d'énergie et qu'elle va se dépenser à fond, l'hypomanie, c'est au moins quatre jours, mais ça peut durer des mois, et bien après, il y a le revers de la médaille qui est qu'on va être très fatigué·e et donc c'est pour ça que la bipolarité c'est des courbes vers le haut, si on reprend notre petite feuille à carreaux, des courbes vers le bas. Parce que l'épuisement qui se génère quand on est en haut, va provoquer des phases de fatigue et pas que de fatigue, mais de mauvaise humeur extrême vers le bas.
Martha:
Donc du coup c'est la fatigue du UP qui génère l'état DOWN en fait ?
Alix:
Oui, en partie. Également, il est important de dire que la personne bipolaire va pouvoir avoir des états stables, c'est à dire retourner sur les petites vagues tranquillou bilou, (Rire) des personnes non-bipolaire.
Martha:
Ok. C'est ce que j'avais noté sur le schéma. Est ce qu'il y a un moment donné où les personnes arrivent à avoir une totale acuité de qui elles sont, d'avoir un contact avec ces états qu'ielles ont vécu ? Et du coup, dans cette stabilité, qu'est ce qui peut se passer ? Qu'est ce qui peut être possible grâce à cet état de stabilité ?
Alix:
Eh ben on respire !! (Rire) Alors je peux te dire que quand je suis en état stable, quand on me demande "comment ça va" et que c'est des personnes qui savent que je suis bipolaire, je dis : "ben écoute, ça va bien en ce moment, je suis en état stable" et à force que je le dise, ou que je le dise pas (rire), les personnes commencent à comprendre ma réalité en fait, qui est que pour moi, le simple fait d'être en état similaire à ce qu'elleux vivent au quotidien, et bien c'est une victoire pour moi.
Martha:
Ok, une victoire du coup sur quoi ? Parce que, en même temps, j'imagine bien que dans ce trouble, on n'est pas... On n'est pas pleinement en capacité de maîtriser le trouble. Ou alors est ce qu'on sait faire? On apprend à faire?
Alix:
Euh... Et bien c'est une bonne question. (Rire)... Est ce que je peux expliquer la manie avant que j'explique comment... Pour finir notre petit schéma sur la feuille à carreaux, parce que la manie c'est ce qui est plus grandiose, mais le mot est mal choisi... Je sais pas quel autre mot utiliser, mais c'est le plus marquant. Voilà. Le plus marquant dans la bipolarité. Euh. Je vais utiliser des mots peut être un peu durs, mais j'ai l'impression que c'est la réalité.
Martha:
Alors on entre vraiment en train de parler. Je rappelle d'un trouble qui amène les gens à avoir des anxiétés et des inquiétudes aussi des états très très UP. Donc là on est en train de parler de ton expérience. Et si pour vous qui êtes en train d'écouter à cet instant, c'est difficile, Encore un trigger warning à cet instant.
Alix:
Oui, tout à fait. Donc la manie déjà quand on est en manie, on veut pas être autre chose qu'en manie. On est dans un état tel qu'on se... En général, les personnes décrivent qu'elles ont l'impression d'être Dieu. Pas toujours, mais c'est quelque chose que j'ai beaucoup lu. On a l'impression d'être Dieu. Je vais donner le témoignage de François Lejeune qui a écrit un livre qui s'appelle "Dans la tête d'un bipolaire".
Martha:
Qui est François Lejeune ?
Alix:
François Lejeune est une personne qui a été diagnostiquée bipolaire dans sa jeunesse. Déjà, lorsqu'il faisait ses études en hôtellerie, il a clairement fait des phases maniaque. Et donc dans ce livre, il explique plusieurs décennies de vécu de personne bipolaire et donc il y a eu beaucoup de phases maniaques. Pourtant, il explique qu'un moment il prend des thymorégulateurs qui sont les médicaments qui peuvent aider, mais dans son cas, ça ne semble pas vraiment avoir aidé. Alors je vous avouerai que j'ai lu un tiers, un demi ou la moitié du livre parce que c'était trop dur pour moi.
Martha:
Qu'est ce qui était dur ?
Alix:
Et bien quand il explique ses manies, c'est vraiment... Alarmant. Donc je vais vous donner des exemples. A un moment, il pense qu'il fait la météo, donc il surfe et il dit "je vais faire déplacer les nuages, c'est moi qui fait... Qui fait pleuvoir." A un autre moment, il va penser que le monde entier est une conspiration. Donc ça commence par son boucher où je dis mais "le boucher il est dans la mafia", "il m'en veut" et puis après son voisin lui parle, il est dans la mafia aussi. Et en fait, les gens dans la rue aussi petit à petit. Et le monde entier dans la mafia, il veut le tuer. Du coup il sort dans la rue et il a une mitraillette imaginaire dans les mains et donc qui commence à tirer de manière imaginaire sur les gens. Donc quelqu'un, quelqu'une a appelé la police et il finit dans un lieu très spécifique qui a un lieu qui est à la fois prison et hôpital psychiatrique. Il dit qu'il y en a qu'un ici à Paris. Je ne sais pas s'il existe encore. Autre exemple, à un moment...
Martha:
Donc ça, c'est vrai, il y a des gens qui sont venus, et qui ont dit "on va te mettre en sécurité."
Alix:
Ah oui, oui, oui, c'est ça. Il va énormément en hôpital psychiatrique. À un autre moment, heureusement, il est avec sa famille, il ouvre la fenêtre et puis il est persuadé qu'il sait volé, donc sa famille le retient. À un autre moment, je m'en rappelle plus bien, mais il vit à Londres à ce moment là. Mais en tout début de sa phase hypomanique, il va déféquer partout dans l'appartement de son frère. Et après il sort de son appartement. Je me rappelle plus qui se qui se passe. Mais donc vous voyez, ça met à rude épreuve les liens sociaux, parce qu'il imaginez bien que cette personne a eu plusieurs phases maniaques. Donc c'est éprouvant pour l'entourage, ils ont peur. L'entourage a également peur pour la vie de cette personne qu'iel aime. Parce que, par exemple, François Lejeune explique qu'il conduit très très vite. Il va atteindre, je sais plus les 200 à 300 km/h dans des virages. Je crois qu'il explique qu'il rentre dans des arbres à plusieurs moments. Enfin c'est très fatigant. Il y a un témoignage de sa mère aussi et c'est extrêmement dur la manière dont elle parle de son fils. On sent un genre d'épuisement émotionnel quoi.
Martha:
Euh. Du coup, hypomanies, manies, c'est l'état maniaque au plus haut point. Et là, en fait, on pourrait se dire comme c'est UP c'est agréable. En fait non, c'est pas du tout agréable. C'est à dire on se dépasse soi même, mais pas au sens où on peut l'entendre dans le sens commun, se dépasser, c'est pouvoir aller plus loin de soi et c'est positif. Non! Là on prend des risques...
Alix:
Oui, mais au moment où tu prends les risques, je ne sais pas si tu t'en rends compte, mais en tout cas, t'es tellement bien que ça te semble la chose à faire.
Martha:
Ah ! on est quand même bien.
Alix:
Ouais ouais, la chose reste accessoire.
Martha:
On devient sauveur·euse du monde un peu...
Alix:
Oui, c'est ça. Ah oui, alors en manie. On peut également être... Entendre des voix, par exemple je connais deux personnes qui... Il y en a une qui à qui Jésus parlait et une autre c'était quelque chose du même ordre. Je me rappelle pas bien et j'ai pas envie de déformer les propos, mais ça vous donne une idée globale et ce qu'il y a d'intéressant, il y a une personne qui me disait que quand elle était en manie, elle tenait un journal, et en fait son écriture était différente de son écriture habituelle et elle a dit quand elle est redescendue de son état maniaque qui avait duré plusieurs mois, en l'occurrence, ça l'a fort troublé. Elle se disait, "j'étais une personne différente". Alors souvent, l'entourage, il est évident que l'entourage se rend compte que dans ces cas là, on est en état maniaque et donc que l'entourage demande à ce qu'on soit interné en hôpital psychiatrique. Ce qu'il faut dire aussi, c'est que ce ne sont pas des états réactionnels à des événements difficiles. C'est à dire que ce n'est pas parce que je viens de réussir mes examens que j'ai eu mon diplôme de licence et que du coup je suis très heureuse, que du coup je vais partir en hypomanie ou en manie. Ce sont des choses qui arrivent, paf !
Martha:
D'accord. Donc ça veut dire que ce n'est pas que c'est pas forcément contrôlable. Je ne peux pas me prémunir de ça. Si je sens que je vais être très heureux, heureuse sur un sujet, je ne vais pas commencer à pouvoir... Je ne vais pas entrer en interaction avec moi même en me disant "Attention, il faut que je mette une routine en place". C'est pas le sujet là.
Alix:
Il faut que je parle d'un type très spécifique de bipolarité qui s'appelle la cyclothymie. La cyclothymie, c'est ce que je viens de vous expliquer, mais en très très rapide. C'est à dire que dans ce que je viens de vous expliquer, classiquement, ce sont des phases qui durent plusieurs jours, voire plusieurs mois. La cyclothymie c'est quelque chose qui va pouvoir même euh on peut être en UP puis en DOWN sur la même journée ou une journée UP, une journée DOWN. Et donc encore une fois, ce n'est pas lié aux humeurs. Donc c'est à dire que tu peux très bien, avoir une soirée chez des amis que tu attends depuis longtemps et être malheureusement à ce moment là en phase down. Donc ce qui te rend moins agréable, tu vas moins profiter de la soirée etc. Et à l'inverse, tu peux aller à un enterrement et être en phase UP. C'est également très compliqué socialement.
Martha:
Donc ça veut dire qu'on est pas forcément dans le contexte.
Alix:
Ah oui, voilà. Ah oui, tout à fait.
Martha:
Du coup ça me fait dire une chose et tu me corriges si je me trompe. Mais très souvent le langage commun a vulgarisé des termes qui par moment même peuvent s'apparenter à de la psychophobie en disant par exemple "il est cyclothymique." "Oh là là, je me sens ceci ou cela." Ces termes qu'on peut employer dans le langage commun. Il faut juste que les personnes qui écoutent à cet instant sachent que ça veut dire que ce sont des réalités pour d'autres personnes. Mais voilà, c'est le langage commun, la vulgarisation de tous ces termes cyclothymique, etc. Ben est ce qu'on pourrait leur dire que ce serait mieux de changer de terminologie ?
Alix:
Ce serait chouette! En parlant de terminologie, ça me fait plaisir que tu en parles. Il y a le mot folie qui est souvent vu de manière tout à fait péjorative. En tant que personne bipolaire, je revendique le fait de me dire folle parce qu'en fait c'est comme ça que je suis et j ai pas honte. Alors ça m'est tombé sur la gueule hein. (rire) On va Pas se mentir. (rire) Mais en fait c'est ok, j'apprends à m'accepter telle que je suis et dans ce cadre, moi personnellement, c'est probablement pas le cas de toutes les personnes bipolaires, mais moi personnellement, je revendique le fait d'être folle parce que j'estime que si un jour je me promène à poil dans la rue, ce qui est un exemple classique qu'on va donner de la manie. Et ben en fait, pour moi c'est une forme de folie et c'est ok parce que ce sera comme ça que j serai. Et je resterai Alice en fait. Et je resterai une personne qui a plein de qualités par ailleurs, et plein de défauts aussi. Mais je resterai moi dans mon intégralité et je sais que mon entourage m'aime et acceptera ça. Et je sais qu'il y a des soignants qui seront là, soignants, soignantes, qui seront là pour s'occuper de moi et me donner des anxiolytiques à gogo pour me faire à un moment redescendre et me mettre en sécurité en attendant que je redescende.
Martha:
Alors toi, tu as le droit de te le dire et de nous le dire et de le revendiquer. Un peu comme d'ailleurs dans la lutte LGBTQIA+, il y a des gens qui se disent Trans Pédé Gouine.
Alix:
Oui, tout à fait.
Martha:
Mais par contre les autres n'ont pas à le définir ou à venir utiliser ce terme.
Alix:
Oui non, je pense pas. Oui, ce serait pas... Je pense que ça pourrait irriter beaucoup de personnes. D'ailleurs, il existe la Mad Pride, donc la fierté des personnes folles et... Et donc il y a plusieurs Mad Pride dans plusieurs villes et je trouve ça formidable, en fait, c'est une manière de lutter contre la psychophobie.
Martha:
On va parler du moment où, parce que je sais un peu pour avoir suivi, tu as communiqué pas mal sur les réseaux sociaux.
Alix:
Oui, tout à fait. Sur une page Instagram qui s'appelle Chroniques_militantes. D'ailleurs, j'ai arrêté cette page, parce que je me suis rendue compte que ça pouvait être difficile pour mon entourage de lire mes états émotionnels qui étaient extrêmes. Et donc j dans la viee me suis dit ça génère de l'anxiété et donc je vais, protéger ma vie sociale parce que c'est ça qui m'aidera plus.
Martha:
Donc tu vas garder ce compte visible ?
Alix:
Pour l'instant, c'est encore visible, parce que j'estime que ça reste un témoignage. Oui, mais je n'ai pas envie de continuer à alimenter l'anxiété dans mon entourage et donc je mettrai pas, en tout cas, je n'ai pas l'intention de continuer à mettre mes états... Mes états thymiques.
Martha:
Ok, alors on va, on va parler si tu veux bien, si tu nous y autorise justement de la découverte de bipolarité. D'abord, qu'est ce qui se passe un jour ? Et surtout comment tu apprends, comment tu ressens ou comment tu vis d'un seul coup ce diagnostic ?
Alix:
Oui. Alors déjà, ce diagnostic, on ne sait pas... enfin ma polarité, quand on m'a diagnostiquée bipolaire, on ne sait pas d'où ça vient. On ne sait pas depuis combien de temps, je suis bipolaire. Il n'y a pas un consensus sur le fait qu'on naisse avec des gènes bipolaires, voire des gènes de bipolarité. On sait qu'il existe ça, mais on ne sait pas si tout le monde a ces gènes. Et d'ailleurs, il est possible que des personnes aient ces gènes mais ne déclarent jamais de bipolarité. Donc on dit qu'à un moment de la vie, on peut finalement déclencher cette bipolarité. Il semblerait que ce soit ce qui se soit passé pour moi, parce que j'ai beau faire une introspection, je ne trouve pas dans mon passé des éléments qui me permettraient de dire que j'étais bipolaire avant. Donc moi j'ai été diagnostiquée l'année dernière en novembre 2021, donc là on est en juillet 2022, ça reste tout récent pour moi. Je me demande si finalement je n'ai pas fait une hypomanie l'été dernier. C'est une découverte récente parce qu'on m'a dit "l'été dernier t'étais comme ça". Mais donc j'ai réfléchi et je me suis dit "tiens, mais c'est un symptôme de l'hypomanie." Alors c'est dur parce que je me rappelle pas exactement comment j'étais, mais ça me semble plutôt être le cas. En tout cas, on arrive en novembre et là ça sort, ça sort de nulle part.
Alix:
Donc maintenant je vais rentrer dans mon témoignage et donc je fais un énorme trigger warning suicide, tentative de suicide. Si vous êtes sensible à ça, je vous invite à passer à la fin du podcast, parce qu'à la fin, je donnerai pas mal de ressources artistiques de lecture et des ressources également pour se faire aider. Mais en tout cas, l'intégralité de mon témoignage sera axée enfin sera beaucoup axé sur les tentatives de suicide et donc ça va être difficile à entendre.
Martha:
Donc en ce qui concerne la suite et les ressources. Vous pouvez vous rendre directement à 72 minutes et 55 secondes de ce podcast.
Alix:
Donc on revient à novembre. Je fais ce qu'on appelle un état mixte. Alors l'état mixte, je l'ai pas défini tout à l'heure parce qu'il est particulier. On va avoir des variations très très très rapide de l'hypomanie ou même la manie avec de la dépression. Et quand je dis très rapide, ça peut même être confondu. Ce qui fait un mixte absolument horrible. Donc dans mon cas précis, j'avais... Parce qu'on peut avoir des obsessions quand on est en hypomanie ou en manie. Et donc moi j'avais concentré et fait une obsession sur le fait de me suicider. Et donc la tentative de suicide, l'envie de mourir étant l'une des caractéristiques, pas systématique, de la dépression ou de la mélancolie profonde. Et donc moi, j'avais les deux choses en même temps. Ce qui a fait que j'ai fait une première tentative de suicide chez moi. Je l'ai raté. Je ne veux pas donner des détails, c'est pas forcément utile, mais dans ce cadre, finalement, il y a des secours qui sont venus, ce que je n'avais pas prévu et donc je me suis retrouvée à l'hôpital psychiatrique. Sauf que ils ont pas tout de suite diagnostiqué un état mixte. Forcément pour l'instant c'était juste une tentative de suicide au regard du personnel soignant. Et donc ce qui s'est passé, c'est que j'ai continué à me mettre en danger dans l'hôpital psychiatrique. Donc j'ai développé une créativité incroyable. Même le personnel soignant était assez ahuri de la créativité que j'ai eu pour continuer mes tentatives de suicide. J'en ai fait au total six sur une période de quelques semaines. Je crois me souvenir. Oui, ça devait être deux ou trois semaines, peut être quatre, et ce malgré les médicaments puisque du coup ils me donnaient des anxiolytiques matin, midi et soir.
Martha:
Donc ce qui veut dire que les médicaments qu'ils te donnaient ne fonctionnait pas.
Alix:
Ah non, ça suffisait pas. Heureusement, au bout d'un moment, on m'a changé d'hôpital psychiatrique, parce qu'en France, en fait, l'hôpital psychiatrique dont vous dépendez, ben en fait, ça dépend du lieu où vous habitez. Et sauf qu'évidemment, il n'y a pas forcément de la place disponible dans l'hôpital psychiatrique dont vous dépendez. Donc moi, au moment du début de ma crise, donc ma première tentative de suicide, on m'a mise dans un hôpital psychiatrique qui n'était pas le mien, mais au bout de dix jours environ on m'a transférée. Donc là ça a été formidable parce que j'ai rencontré un nouveau psychiatre qui lui a tout de suite dit, enfin très rapidement dit "vous êtes en état mixte. C'est très clair." L'exemple qu'il donnait, c'est que, un jour, on a refusé de me donner un grand bol pour me boire un thé et du coup j'ai voulu... En fait, j'ai fait une tentative de suicide juste après, encore une fois, en débordant de créativité. Parce que l'hôpital psychiatrique est un lieu tout à fait sécure pour qu'on puisse pas faire de tentative de suicide. Mais j'ai réussi à en faire cinq dans l'hôpital psychiatrique. Voilà. Et par ailleurs, dans la même journée, je pouvais faire autre chose et être super heureuse en disant mais c'est génial, j'adore être en hôpital psychiatrique, mais qu'est ce que je m'éclate ici ! Et en le pensant! Ou pas forcément dans la même journée, peut être le lendemain. Mais voilà. Donc ça c'est l'état mix, un mélange confu d'humeurs extrêmes et je trouve que c'est un état horrible. Je le vis très mal, je vis très mal d'avoir eu ça. En plus...
Martha:
En en quoi tu le vis mal ? Qu'est ce que tu ressens aujourd'hui en t'en souvenant ?
Alix:
Eh ben... Je suis choquée. Je suis choquée de ce que j'ai pu faire, Je suis choquée de toutes ces tentatives de suicide et de cette obsession autour de ça, alors que j'allais bien dans ma vie. Alors faut savoir aussi que ce qui a empiré les choses, c'est que le cinquième jour de mon hospitalisation, ma petite amie est venue et m'a quittée. Donc ça, c'est un dommage collatéral de la bipolarité en fait. Donc ça, ça a été également très dur, ça l'est toujours à accepter.
Martha:
Du coup, tu te juges aussi dans ce que tu as été. C'est à dire qu'il y a une espèce de...
Alix:
Oui. Ben oui, clairement, j'ai un jugement dur envers moi même parce que ce que j'ai fait c'était horrible. Je pense que c'était horrible à gérer pour les soignants soignantes. Dans certains cas, c'était horrible à voir pour d'autres patients patientes de l'hôpital psychiatrique qui avaient également leurs propres problèmes à gérer, leurs propres états à gérer. Donc oui.
Martha:
Mais on est bien d'accord, que tu t'en veux, mais en même temps tu n'y peux pas grand chose.
Alix:
Ben non, je n'y peux rien, ça m'est tombé sur le coin de la gueule.
Martha:
Est ce que c'est ça qui contribue par exemple au fait que, je peux lire à un moment donné sur les réseaux que tu refuses cet état ou que tu n'en veux pas ?
Alix:
Oui. Alors j'ai même eu une phase où j'ai nié être bipolaire pendant deux mois et j'ai fait des pieds et des mains pour obtenir un rendez vous avec le psychiatre qui m'a initialement diagnostiquée pour lui expliquer en quoi je n'étais pas bipolaire et que lui m'explique vraiment ce qui l'avait conduit à poser ce diagnostic pour savoir un peu et me faire ma propre idée.
Martha:
Ok. Justement, on va parler de, si tu veux bien, de cet instant où tu découvres ton diagnostic. Et du coup, il se passe quoi pour toi, en particulier le rapport à ce refus ?
Alix:
Alors je pense qu'au moment où on m'a vraiment dit "Tu es bipolaire" ou dans les jours qui ont suivi, je crois qu'il y a eu un mélange de soulagement qu'on dise ce qui se passait parce que clairement je me rendais compte que j'étais bizarre, et un mélange où j'étais alarmée parce que j'avais... Ils m'avaient donné une brochure sur la bipolarité, très bien faite, qui est une ressource que je peux partager dès maintenant, cette brochure existe en ligne sur un site très bien fait qui s'appelle psycom.fr. Donc il m'avait donné cette petite brochure, mais évidemment ils m'ont également et tout d'abord expliqué de vive voix ce que c'était. Donc ça m'a... Ils ont utilisé des mots doux, donc ça ne m'a pas alarmé tout de suite. Mais petit à petit, quand je me suis renseignée et que j'ai eu la brochure et que j'ai compris, là, j'ai commencé à flipper tout en étant soulagée de comprendre ce qui se passait dans ma tête.
Martha:
D'un côté, on comprend parce que enfin, on se dit qu'il y a une explication. Parce qu'au moment où on le vit, où on vit ces passages, ce mixte par exemple, on a conscience qu'on est dans le mixte ou pas tout à fait ?
Alix:
Euh... Oui, oui et non. Je savais qu'il y avait quelque chose de bizarre parce que j'avais jamais été comme ça, mais je crois que je comprenais pas bien quand on me disait "tu es en état mixte." C'était théorique quoi. Donc oui et non.
Martha:
Alors du coup, tu apprends. À la fois ça soulage, mais pas seulement en fait.
Alix:
Alors pas seulement parce que aussi, dans cette plaquette, il y avait des faits, c'est normal, c'était pour renseigner sur ce qu'est la bipolarité et puis à un moment, il ne faut pas tout édulcorer. Dans cette plaquette il est écrit... Alors j'ai pas dit, ça s'appelait anciennement la psychose maniacodépressive. Donc on entend, c'est vraiment passé dans le langage courant: maniaco dépressif. Donc sur cette plaquette il était écrit ça, mais aussi que 15% des personnes bipolaires se suicident, réussissent à se suicider. Donc je ne sais pas si on a des statistiques sur le nombre de personnes qui font des tentatives de suicide, mais donc déjà 15 % des personnes réussissent à se suicider, enfin finissent par se suicider. Et par conséquent, la moyenne d'âge des personnes bipolaires est réduite de 20 ans. Parce qu'on fait une moyenne. Il y a beaucoup de personnes qui meurent jeunes.
Martha:
Et ça, ça t'as plutôt... Inquiété ?
Alix:
Ah ben oui, surtout que moi j'étais en plein épisode où j'enchaînais les tentatives de suicide.
Martha:
D'accord.
Alix:
Mais encore aujourd'hui, ça m'inquiète. Je ne sais pas si ma famille est au courant de cette statistique, mais je pense que c'est très flippant pour l'entourage de se dire "il y a une chance sur cinq que ma fille meurt. Quoi "?
Martha:
Tu penses souvent à l'entourage. Tu nous a parlé souvent de l'entourage ici à ce micro depuis qu'on a commencé...
Alix:
Oui, je pense que c'est dur pour l'entourage. Je pense que j'ai éprouvé beaucoup de personnes autour de moi.
Martha:
Ok, ça veut dire que tu culpabilises ?
Alix:
Ben... peut être un peu, mais évidemment derrière je suis capable de me dire que c'est pas de ma faute. Et en plus, vraiment, je déploie énormément d'efforts pour essayer de m'en sortir, parce qu'il y a des choses qu'on peut faire quand même et je le fais.
Martha:
C'est ça que tu vas nous dire ?
Alix:
Et bien oui.
Martha:
Mais on est bien d'accord. Toi, tu ne veux pas de ce diagnostic, tu le refuses. Tu le cries fort d'ailleurs...
Alix:
Ah non ! Alors oui, j'ai eu cette phase. Maintenant, j'ai complètement accepté que j'étais bipolaire. Mais ce qu'il y a aussi, c'est qu'un diagnostic, c'est pas certain certain. C'est à dire que c'est pas blanc ou noir quoi, c'est pas comme si il se passait quelque chose et que c'était évident. J'ai pas de meilleur exemple. (Rire) Je m'attendais à trouver de manière instantanée un bon exemple, mais j'en ai pas. Mais du coup mon diagnostic, des fois je me dis "est ce que est ce que c'est vraiment ça ? J'ai encore des moments de doute." Et par ailleurs, à deux reprises, deux différents psychiatres m'ont dit "tu es peut être borderline". Donc borderline, c'est en français trouble de la personnalité limite, je ne me permettrais pas d'en parler, déjà parce que je suis pas sûre d'être concernée et également parce que je connais encore très peu ce trouble. C'est seulement il y a deux ou trois semaines qu'un second psychiatre m'a dit ça. Donc je commence tout juste à me renseigner et j'y vais doucement parce que j'essaie de prendre soin de ma santé mentale et aussi je suis en état stable, et du coup j'essaie d'en profiter un peu. (rire) Donc le diagnostic, c'est quand même quelque chose qui n'est pas si facile à poser. Et des fois oui, j'ai des petits moments de doute et d'ailleurs je me dis "mais imagine, en fait je ne suis pas bipolaire" mais qu'est ce que... Alors ce serait une bonne nouvelle... Mais qu'est ce que je serais ridicule d'être venue à NONBI Radio en parler ? Qu'est ce que je serais ridicule d'avoir fait part de mes états d'âme de pseudo personne bipolaire sur une page Instagram...
Martha:
Oui sauf que c'est... Tu témoignes de ta propre évolution et de ta propre connaissance des choses et ça fait partie probablement d'ailleurs de ce qui est en train de se construire sur la conscience de soi... J'imagine.
Alix:
Oui, tout à fait. Même si j'étais pas bipolaire en réalité, j'aimerais bien. Ce serait une bonne nouvelle, même si j'aurais l'air bête. Mais dans tous les cas, j'ai un état psychique, un trouble psychique, alors quel qu'il soit, j'en ai un. Voilà, c'est peut être juste qu'on a peut être pas encore trouvé le bon mot. Bon, l'équipe psy qui me suit est plutôt sure que je sois bipolaire, je ne vais pas trop me mentir. (rire)
Martha:
Ce que j'aime à ce micro avec toi, là, si j'avais quelque chose à aimer et à contrario non pas à ne pas aimer, mais... Ce que j'apprécie plutôt, c'est de voir à quel point ta personnalité est toujours souriante en fait.
Alix:
Oui, elle l'est peut être moins quand je suis en état dépressif
Martha:
J'imagine.
Alix:
Hum. Alors je rigole, j'espère heurter personne parce que l'état dépressif n'est pas une chose dont on puisse rigoler à proprement parler bien sur. Je rigole juste parce que je ne sais pas. La blague est venue comme ça. Je m'excuse si j'ai heurté la sensibilité de personnes.
Martha:
Moi je suis persuadée que les auditeurices qui t'entendent savent d'où tu parles en fait ? Et que toi tu peux te permettre de sourire parce que quand tu souris, c'est pas de la dépression, c'est de ces états qui passent comme ça, qui changent.
Alix:
C'est aussi une question de prise de recul sur les états par lesquels je suis passée. Alors d'ailleurs, depuis mon trouble mixte qui a duré environ cinq semaines en novembre, je suis passée ensuite par un état de dépression, peut être même de mélancolie profonde, comme je le disais tout à l'heure. J'ai ensuite eu un mini état stable. J'ai fait à priori une petite hypomanie et ensuite de l'hypomanie, je suis repassée tout de suite en dépression qui a duré plusieurs semaines. Et donc ça m'amène à depuis deux ou trois semaines où je suis en état stable. Sur ces périodes que je viens d'expliquer, sur ces périodes dépressives, j'ai refait trois séjours en hôpital psychiatrique de plus ou moins courte durée. Ces épisodes d'internement ont fait suite à de nouvelles tentatives de suicide.
Martha:
Donc depuis le mois de novembre, tu es passée par plein de phases, plein d'étapes. J'imagine que ça doit être super fatigant d'un point de vue énergie?
Alix:
Ah oui oui, c'est très fatigant. Surtout que dans la vie professionnelle, j'ai essayé de compenser comme je pouvais, notamment quand j'étais en phase dépressive, parce que je me reconvertis dans l'art, et dans ce cadre, j'ai la chance et le privilège d'avoir trouvé un poste de 10h par semaine qui me passionne. Je suis prof de modelage céramique et donc je suis ravie, j'espère garder ce travail aussi longtemps que possible. Ça a été compliqué, j'ai été absente cinq semaines en novembre, donc les élèves qui sont des adultes ont dû être bien embêtés par ça. Heureusement, j'ai trouvé une remplaçante qui n'était pas des plus compétente, donc ça n'a pas été un succès total. Mais au moins, les élèves ont pu venir. J'ai fait mon second internement, c'était pendant les vacances de Pâques et je pense que j'ai vraiment retenu mes envies suicidaires, ça peut paraître étonnant, mais parce que j'étais à une semaine des vacances de Pâques et je me disais "il faut pas que tu sois absente au travail." En plus, j'avais une absence à cause du covid, en mars. Je me suis dit : "Tu ne peux pas encore, tu ne peux pas, tu ne peux pas être encore absente au travail quoi, il va y avoir un ras le bol de la part des directeurices. Il va y avoir un ras le bol de la part des élèves." Et moi c'est ma première année. Ce boulot, je l'adore. C'est genre un des points les plus positifs de ma vie. Je veux le garder, je veux qu'on me renouvelle mon contrat l'année prochaine. Donc grosse pression. Je pense que du coup j'ai réussi à assurer mes derniers cours avant les vacances de Pâques et juste après j'ai décompressé, j'ai fait une tentative de suicide.
Martha:
Donc tu es en train de nous expliquer que tu as senti venir un état...
Alix:
J'étais déjà en dépression et j'avais déjà envie de mourir. Je ne suis pas passée à l'acte, j'ai retardé. Enfin, j'ai pas prémédité mon passage à l'acte mais je me disais "faut pas que je passe à l'acte, faut pas que je passe à l'acte." "Assure, assure jusqu'au bout." Et si je passe à l'acte, peut être que je mourrai pas, c'est pas clair, tu vois ? Enfin, pour moi, c'est difficile de se suicider parce que je veux être sûre de réussir, donc j'essaie de... enfin bref. Et donc je me disais "je retarde ça..."
Martha:
Ok. (un souffle)
Alix:
J'essaie en tout cas de temporiser quoi. Et comme ça, alors désolé, ça va être difficile à entendre encore une fois, mais "comme ça, si je meurs, au moins ce sera pendant les vacances de Pâques et j'aurais assuré, je serais restée professionnelle quoi." Je sais que ça que ça peut paraître bizarre, c'est mon état, c'est mon état en tout cas.
Martha:
Oui, et c'est un état presque cynique en fait sur la situation.
Alix:
Oui, oui, oui.
Martha:
C'est toute la difficulté de vivre ces états là. Un peu comme une distanciation que tu fais et que tu crées.
Alix:
Oui, oui, je pense que oui... J'aimerais donner un autre exemple de l'impact sur la vie professionnelle. Eh bien, il s'avère que j'ai fait une autre tentative de suicide un mardi et je donne cours les lundis et les jeudis. Et donc ben voilà, je fais une tentative de suicide un mardi et j'ai un état amnésique qui résulte de ça qui dure 50 heures. Mais il semblerait que je sois partie au travail le jeudi et d'après les comptes rendus médicaux, c'est écrit que je souhaitais aller au travail et donc que dans ce cadre, parce qu'ils sont toujours contents, quand on retourne très vite à la vie sociale et professionnelle rapidement, parce que ça veut dire qu'on reprend nos marques, ça veut dire qu'on n'est pas ce qu'ils appellent institutionnalisé·e. C'est quelque chose qui consiste à aller de plus en plus en hôpital psychiatrique et à perdre pied dans la vie réelle. Après, on ne sait plus comment faire, on perd nos repères. Donc eux si, s'ils estiment qu'il n'y a pas de mise en danger, ce qui était mon cas vu qu'apparemment je disais: "je ferai plus jamais tentative de suicide" et je le pense à chaque fois, ils ont dit "on la laisse sortir" mais apparemment j'étais en état de parler quoi, même si je m'en rappelle pas. Et donc je suis allée au travail... Alors mes élèves m'ont dit la semaine d'après que j'étais dans un état clairement pas normal à cause des médicaments. J'étais complètement stone, clairement j'avais apparemment des tous petits yeux et j'ai fait quelques conneries. Mais bon, j'ai réussi à assurer mon cours, donc dans cet état un peu second, enfin je ne sais pas comment il était vu que j'suis amnésique, dans cet état en tout cas, j'ai souhaité être professionnelle et aller au travail. Je regrette un peu, mais je regrette pas tout à fait parce que c'était l'avant dernier cours de l'année et que mes élèves m'en auraient tellement voulu. Parce que quand on fait du modelage, après les pièces sèchent et donc si j'étais pas venue, la sculpture auraient été bousillées. Donc il y en a qui bossaient dessus depuis six semaines et c'est compliqué. Et je pense que ça c'est juste un exemple de ma vie professionnelle. Mais on peut imaginer pour les autres personnes bipolaires plein de choses. Je sais pas... Quelqu'un qui bosserait dans une agence de pub, qui a la présentation de son travail devant le client, qui dirait "mais faut que j'aille présenter quoi, parce que sinon je suis grillée dans un milieu professionnel." Et du coup on se retrouve à essayer d'assurer une vie professionnelle normale alors qu'en fait on a un handicap.
Martha:
Ce que je te propose à cet instant, c'est qu'on fasse une pause musicale.
Alix:
D'accord...
Martha:
Et on reprend juste après. Ça te va?
Alix:
Ok...
Musique
Martha:
C'est notre retour après cette pause musicale. Alors on a inscrit une pause musicale parce que il m'a semblé que c'était nécessaire à ce stade. Et d'ailleurs toi, comment tu te sens à cet instant ?
Alix:
Ben je me sens très bien en fait, parce que je trouve que c'est important de parler de ça! Et en fait, ce que je disais en début d'interview, il y a un côté un peu mégalo, mais il n'y a pas que de la honte dans mon parcours. Il y a aussi... Des fois je suis capable de voir que j'ai un côté warrior, en fait, j'ai traversé tout ça et je suis capable de voir que c'est quand même impressionnant. D'ailleurs, je tiens un journal des humeurs. Euh donc le Journal des humeurs... Je fais la petite courbe dont je vous parlais avec mon histoire de petits carreaux. Donc je fais ça. Et aussi j'explique ce qui se passe au quotidien, ce qui pourrait ensuite permettre une analyse pour voir un peu les schémas qui se dessinent. Donc ça, ça s'inscrit dans le fait de mieux connaître sa bipolarité, la manière dont elle se manifeste. Parce qu'évidemment elle est différente d'une personne à l'autre et c'est semblerait-il important de le faire, parce que si tu connais mieux tes cycles d'humeur... Par exemple, je connais quelqu'un qui va partir en hypomanie si il lui manque du sommeil et il a besoin de faire absolument une sieste tous les jours. Et si pendant deux ou trois jours il rate ses siestes pour un événement X ou Y, il sait qu'il va partir en hypomanie. Et ça, s'il le sait, c'est parce qu'il a analysé au fil des années ses états d'humeurs. Et donc, il y a d'ailleurs des personnes bipolaires qui tiennent également un journal du sommeil pour faire des corrélations. L'hygiène du sommeil est extrêmement importante chez les personnes bipolaires, au même titre que l'hygiène de vie. Donc l'idée c'est de ne pas boire d'alcool, de ne pas consommer de substances quelles qu'elles soient en fait, parce que ça, ça peut déclencher ou aggraver les états thymiques.
Martha:
Ce qui veut dire qu'on peut devenir plutôt autonome par rapport à son trouble ?
Alix:
Je pense qu'on n'est jamais autonome parce qu'on a besoin à un moment donné d'une équipe psy pour être accompagné·e, parce que toutes les personnes bipolaires ne réussissent pas à rester toute une vie dans un état de stabilité. Alors certaines personnes y arrivent. Je connais une personne qui a maintenant environ 70 ans, qui s'est fait diagnostiquer environ vers ses 20ans et qui a vécu environ 50 ans d'état stable. Alors pourquoi ? Parce qu'on ne peut pas soigner la bipolarité, mais on peut atténuer les phases UP and DOWN. Comment on fait ? On va prendre en fait un médicament ou des médicaments combinés qui s'appellent des thymorégulateurs. Donc THYMO, l'humeur, donc régulateurs de l'humeur. Les thymorégulateurs, c'est un peu notre espoir principal, en fait. Ce sont des médicaments. (Rire) Je me répète, ce sont les médicaments qui font réguler l'humeur. Il en existe différents types. En 1965 a été inventé un thymorégulateur qui a tout changé qui s'appelle le lithium. Alors il est donné en extrêmes petites quantités, quantités infimes, parce qu'il est toxique notamment. En fait, il a plein d'effets secondaires. Donc entre autres, il va faire qu'on a soif, qu'on doit beaucoup boire d'eau pour l'éliminer un maximum. Et donc il va bousiller nos reins petit à petit. La personne dont je parlais, qui a été en état stable toute sa vie, c'est parce que le lithium fonctionnait à merveille sur elle. Et maintenant qu'elle a environ 70ans, ses reins sont bousillés. Les médecins estiment que d'ici 10ans, elle sera sous dialyse et donc actuellement, elle doit choisir entre le lithium et son état stable ou ses reins. Et donc ils sont quand même en train d'essayer de switché ses médicaments. Il existe d'autres thymorégulateurs, donc ils essayent de faire un peu un mixte pour quand même qu'elle prenne moins de lithium. Alors il existe d'autres thymorégulateurs, il y en a qui vont très bien fonctionner chez une personne, d'autres non. C'est compliqué en fait de trouver le thymorégulateur qui convient à une personne et dans quelle quantité. Quelle est la quantité nécessaire à cette personne. En plus on est sur des choses qui se vérifient à moyen terme, entre deux, la personne peut se mettre en danger. Du coup, on peut conclure que la dose n'est pas suffisante ou que la molécule n'est pas la bonne. Il y a des personnes qui ont deux thymorégulateurs. Il y a des très très rares cas où les personnes vont avoir un thymorégulateur et un antidépresseur. Mais c'est rare parce que l'antidépresseur est quelque chose qui va générer des phases UP and DOWN. Donc c'est un peu un médicament entre guillemets "interdit" ou tout au moins très fortement déconseillé chez les personnes bipolaires. C'est un peu un dernier recours. D'ailleurs les antidépresseurs peuvent déclencher la bipolarité. Moi j'étais sous antidépresseurs avan mon état mixte de novembre. Par conséquent, à l'hôpital je mettais tellement ma vie en danger que les psychiatres ont fait quelque chose qu'il ne faut jamais faire dans d'autres circonstances, c'est qu'ils ont arrêté de manière urgente mon antidépresseur. J'étais sous haute dose et sur deux jours ils m'ont fait arrêter. Alors qu'on sait très bien que les antidépresseurs faut que ça soit fait de manière sécure et pour pas mettre votre vie en danger, il faut le faire de manière très progressive et en étant accompagné· par un ou une professionnel·le de santé évidemment.
Martha:
Donc finalement, c'était une décision difficile à prendre pour elleux, mais on peut dire que heureusement qu'ils ont eu le courage de la prendre finalement pour toi.
Alix:
Ah oui, il y avait urgence vitale. Moi ils ont commencé les thymorégulateurs au même moment, ce qui compensait aussi. Ça faisait un switch mais ils ont dit : "là faut arrêter de donner la molécule qui a peut être généré sa bipolarité, qui est en train peut être de générer ces tentatives de suicide à répétition et cet état mixte."
Martha:
Aujourd'hui tu es encore sous thymorégulateur.
Alix:
Ah ben oui, clairement ! Toute ma vie! Toute ma vie j'y serai. Donc moi j'ai eu le lithium au début. Le lithium est intéressant parce que c'est le médicament qui agit le plus sur les tentatives de suicide notamment. Mais comme je dis environ 15 % des personnes bipolaires qui se suicident. Par conséquent, le lithium est très intéressant. Sauf que chez moi, le lithium a eu un effet secondaire qui est qu'il m'a couvert le visage d'acné. Alors je vous laisse imaginer que quand vous êtes en dépression et qu'en plus votre estime de vous-même baisse parce que à chaque fois vous regardez dans le miroir, vous vous détestez.... Ça fait un combo encore pire. Et donc moi j'ai demandé à ce qu'on me change de Thymorégulateur, parce que j'en pouvais plus, en fait.
Martha:
Tu n'en pouvais plus de cette image que tu ne voulais pas de toi.
Alix:
Oui c'est ça. Oui c'est très dur à accepter.
Martha:
Et aujourd'hui ?
Alix:
Et bien aujourd'hui, on m'a donné un nouveau thymorégulateur, je suis pas encore convaincue qu'il fonctionne chez moi. Ceci dit, je suis en état stable, donc peut être que c'est le cas. Après, j'ai fait deux hospitalisations en juin, Là on est le 21 juillet, euh bon, on a pas assez de recul quoi. Des fois je me dis aussi "je ne suis pas la dose max de thymorégulateur. Est ce qu'il faudrait pas augmenter cette dose quoi ?" Bon, tant que je suis en état stable, à priori non, mais si ça change, je crois qu'il faudra peut être qu'on fasse quelque chose quoi. On a peut être pas encore trouvé le traitement qui me convient à moi. C'est vraiment variable d'une personne bipolaire à une autre les médicaments. On ne peut pas dire de règle générale. Je ne suis pas là pour dire le lithium, ça marche ou ça marche pas. Ça dépendra de la personne.
Martha:
Et en même temps, ça fait très peu de temps que ta bipolarité a été découverte si c'est le bon diagnostic. Et visiblement, comme tu l'as dit, tu es une warrior...
Alix:
Rires.
Martha:
...Sous-entendu dans ce que j'entends, c'est que : "quel chemin parcouru depuis novembre pour toi !"
Alix:
Oui, c'est un chemin plein d'obstacles, je me dis que je les ai surmonté quand même. Mais tu vois, en blessant mon entourage, en inquiétant mon entourage, finalement, c'est pas quelque chose sans séquelles. Et moi je reste choquée de ce que j'ai fait. Donc ça m'a changé en fait. Et comme c'est un handicap, en fait, on l'a pour la vie, c'est pas quelque chose qui se soigne, c'est quelque chose qui s'atténue mais qui ne se soigne pas. Par conséquent, je me dis que je vais continuer à faire du mal à mon entourage.
Martha:
Ton entourage t'aime?
Alix:
Oui, mais quand je lis des témoignages, c'est pas toujours suffisant. Quand t'éprouve trop l'entourage en fait.
Martha:
Tu as une crainte de ça ?
Alix:
Ah oui, oui, complètement! Ah oui, ça c'est ma pire peur d'éloigner les gens que j'aime et qui m'aiment. Aussi, faut dire que moi ça a commencé avec un trauma puisque je me suis faite quitter de la personne que j'aime et qui m'aimait au 5ème jour de mon hospitalisation. Donc ça a aussi je pense clairement déclencher un trauma quoi. Je me dis: "vie de couple, merci bien quoi! Qu'est ce que ça va donner ?"
Martha:
Oui donc ça crée des anxiétés quand on est en phase stable, on a aussi la réalité qui nous revient et ça c'est difficile à gérer.
Alix:
Ouais, je pense que quand j'étais en hypomanie, je n'avais pas conscience de cette réalité parce que je voyais tout en rose. J'ai adoré l'hypomanie, c'était vraiment chouette. Elle a été courte mais j'ai regretté qu'elle soit courte. (Rire) C'est assez classique ça. On a souvent envie de retourner en hypomanie. D'ailleurs, il y a des personnes bipolaires qui arrêtent leur thymorégulateur pour...
Martha:
Retrouver l'état ?
Alix:
Ouais, ouais. Alors il y a un court métrage de 45 minutes que vous trouverez sur YouTube qui s'appelle Pour Ernestine, qui a été réalisé par une personne bipolaire qui explique dans ce film que les thymorégulateurs ont coupé sa créativité. Et pour lui c'est très difficile en tant qu'artiste et réalisateur. Du coup, on le voit, en train d'essayer de changer ses médicaments, son traitement. On voit avec ses médecins. Évidemment, il se fait accompagner pour ça, pour essayer de retrouver cette créativité. C'est compliqué parce qu'en plus, à ce moment là, il explique qu'il en état stable depuis des années et des années aussi, il est papa donc c'est plein de questionnements. Également, il a eu cet enfant avec son épouse ou sa compagne qui est également bipolaire. Et donc dans le premier volet de ce court métrage que je vous conseille plus plus plus.
Martha:
Que tu conseilles parce que ça permet aux gens par exemple qui ne sont pas concernés de comprendre la situation ?
Alix:
Exactement. Alors le premier volet est extrêmement pédagogique. Donc si vous voulez bien comprendre ce qu'est la bipolarité de manière douce en images, avec une alternance de témoignages de psychologues, psychiatres et surtout une personne concernée qui est l'épouse du réalisateur, et bien je vous conseille. Ça s'appelle Humeur Liquide, disponible sur YouTube, une durée de 45 minutes. Mais je pense que c'est très très effrayant d'avoir ta fille qui est bipolaire. La dernière fois que j'ai dit à ma mère que j'avais été en hôpital psychiatrique, elle a compris que ça voulait dire... Je lui ai dit "bah parce que j'avais fait une bêtise"...
Martha:
Elle comprend le mot bêtise à ce moment là bien sur.
Alix:
Ben oui, c'est contextuel. Et du coup je l'ai vu, elle a détourné la tête parce qu'elle avait envie de pleurer, elle a essayé de pas pleurer, c'est extrêmement dur. Je pense que pour une mère, pour un père c'est.. ça doit être tellement dur.
Martha:
Et iels finiront, je pense par elleux-même de passer dans une espèce d'acceptation.
Alix:
Oui, tout à fait! Et eux ont leur propre cycle, tout comme moi j'ai le mien. Et d'ailleurs j'aime beaucoup parce que maintenant, même certains membres de ma famille vont me demander des choses spécifiques à ma bipolarité. Et j'aime ça parce que ça ne passe pas sous silence ma réalité. Et j'aime bien parce que maintenant je réponds à comment ça va ? "Hum. En ce moment ça va bien, je suis en état stable" et ça j'apprécie parce que pour moi c'est important, en fait, c'est la réalité de ma vie. Je veux dire tous les jours ou tous les deux jours, je tiens un journal des humeurs ce que personne d'autre fait à part les personnes bipolaires. C'est une réalité, tous les soirs je dois prendre mon thymorégulateur et faut surtout, surtout, surtout pas que j'oublie. Quand j'étais sous lithium, le lithium, oui, parce que c'est dangereux, comme je le disais toutes les semaines au début, on doit vous faire une prise de sang, puis toutes les deux semaines, puis tous les trois mois quand ça fait vraiment longtemps que vous le prenez et dès qu'on voit que vous dépassez le seuil de danger, il faut agir urgemment et réduire la dose de lithium. Et en plus, pour vous dire un peu l'étendue des contraintes, le lithium par exemple moi je le prenais tout le temps à 21h, la prise de sang devait être faite à 9h zéro zéro, pile à 12 h d'écart pour qu'on ait tout le temps la même référence. Donc vous voyez, c'est des petites contraintes qui finalement ne sont pas grand chose par rapport aux états thymiques qui peuvent mettre en grande souffrance. Mais c'est un ensemble de petits détails qui rendent malgré tout la vie un peu difficile.
Martha:
Ok, donc on sait qu'il y a des moyens d'accompagner.
Alix:
Oui mais alors il y en a d'autres. Il y en a deux autres. Pour finir sur ce qui est médical, il existe en dernier recours l'électroconvulsivothérapie, c'est ce qu'on a appelé autrefois les électrochocs. C'est fait évidemment avec le consentement de la personne. On n'est pas sur l'imaginaire qu'on peut avoir autour de ce qui était subi à une époque contre le consentement de la personne. Et donc c'est une sorte de dernier recours. Je suis pas trop renseigné sur ça, mais c'est quelque chose d'assez rare. Par contre, ce qui est vraiment essentiel, c'est la psychothérapie, plus être accompagnée par un psychiatre. Moi personnellement je suis suivie par mon CMP. Donc le CMP c'est un centre médico psychologique, tout le monde dépend d'un CMP je sais pas. Ça veut dire que dans votre quartier on est rattaché au CMP, c'est en fonction du lieu d'habitation. Alors je ne sais pas ce que ça donne dans les déserts médicaux de France. J'imagine que c'est la loi et qu'il y en a, mais j'imagine aussi qu'il doit y avoir beaucoup de kilomètres qui peuvent séparer une personne de son CMP.
Martha:
Je ne sais pas si ça peut aider de l'entendre, mais il y a de plus en plus de psychologues qui ont mis en place des séances par visio et ça a un vrai effet positif parce que la visio c'est le moindre mal quand on doit être en contact.
Alix:
C'est une bonne nouvelle du coup pour les personnes qui sont concernées.
Martha:
Donc surtout ce que tu conseilles bien sûr, ou tout du moins dans ta propre expérience, c'est que avoir un thérapeute ou une thérapeute et un ou une psychiatre qui travaillent... Ils travaillent ensemble aussi ?
Alix:
Alors oui, peut être pas toujours selon les personnes. Dans mon cas, oui, parce que ce sont des professionnels de santé de mon CMP. Du coup, oui, clairement, l'information circule. Je suis également suivie par une équipe d'infirmiers et d'infirmières psy qui sont notamment très très présent·es lors des situations de crise. Techniquement, quand je sors de l'hôpital psychiatrique, il se met en place un suivi SIIC, ça veut dire suivi intensif intercité. L'idée c'est de faire sortir la personne de l'hôpital psychiatrique afin que la personne reprenne ses habitudes le plus rapidement possible le travail, les relations amicales, et cetera... Mes chats en l'occurrence et la ronron thérapie ça marche vraiment. (Rire
Martha:
Tes chats t'aident beaucoup ?
Alix:
Oui ! Alors en parlant de mes chats, du coup, j'ai complètement perdu le fil de ma pensée.
Martha:
Tu es en train de parler de la SIIC ?
Alix:
Oui oui oui du SIIC! Du coup tu retournes à la maison mais t'es suivie, iels te lâchent pas dans la nature et heureusement. Du coup, moi, tous les jours, iels se déplaçaient à la maison, tant que j'étais en état de crise.J'étais dans des états émotionnels encore très forts.
Martha:
Ça te faisait du bien de les voir ?
Alix:
Ah ben oui, on se sent pas abandonnée. Et une fois par semaine, c'est carrément un ou une infirmière psy qui vient à la maison avec un psychiatre. Et je peux vous dire que ça fait bizarre parce que c'est le psychiatre que tu vois à l'hôpital psychiatrique ou en CMP qui vient et qui est dans ton canapé. (Rire
Martha:
Et il n'est pas en blouse blanche en plus à ce moment là?
Alix:
Non non non! Mais genre c'est drôle, je le voyais à côté de la litière de mes chats et je me disais: "oh my god! C'est en train de se passer !" En plus il entre dans ma maison et il me dit: "Ah oui, vous me parliez de votre maison, vous la trouviez un peu sombre, mais moi je la trouve pas si sombre que ça." Je me suis dit: "mais de où, Je lui ai parlé de ça? C'est un psychiatre et il se rappelle de ça!" Je crois que je lui avais parlé de ça parce que, c'est quand j'étais en dépression, et je lui disais même dans ma maison, je me sens triste. Sombre. C'est l'hiver... (Rire) C'était juste hyper comique qu'un psychiatre qui parle de ma maison. (Rire)
Martha:
Oui, et c'est important que tu nous parles de ça, parce que tu es en train de nous parler d'une proximité qui se crée, d'une dynamique...
Orateur 3
Ah oui. Ça c'est formidable. Franchement, moi je suis reconnaissante. Plus plus plus. de l'équipe psy. Ils sont vraiment formidables. Et tu vois, là je suis sortie de l'état de crise et hier après-midi, j'ai eu un coup de fil du CMP et je sais que c'est mon infirmière psy de référence qui m'appelle pour prendre de mes nouvelles parce qu'on avait convenu que pendant mes vacances je sortais du SIIC mais du coup elle prendrait de mes nouvelles...
Martha:
Et du coup? Quand tu as eu l'appel.
Orateur 3
(Rire) Ben comme on est à l'université d'été de la libération animale et que hier soir il y avait une scène ouverte qui était formidable, j'ai oublié de répondre (Rire), mais je vais les appeler pour les... Elle sait que je vais bien en ce moment, j'avais laissé un message... Donc je vais appeler pour dire "tout va bien", elle va prendre de mes nouvelles.
Martha:
Donc. Et en fait il faut comprendre que pour aller bien et se sentir bien et vivre pleinement bien, on doit absolument, enfin, c'est important justement d'avoir une équipe autour de soi.
Alix:
Ouais, pour moi en tout cas, c'est une chose qui m'aide vraiment. Alors ce qui est de triste, c'est vraiment politique, c'est qu'il y a un manque incroyable de psychiatres en France. Merci au gouvernement qui a mis des quotas il y a des années sur le nombre de psychiatres, de gynécologues, de dermato, enfin bref... Donc moi, ce que je constate dans mon groupe de parole, parce qu'il existe des groupes de parole pour personnes bipolaires, et ça c'est d'un grand secours et d'une grande aide, eh bien très souvent notre conversation tourne autour de "Je ne vois pas mon psychiatre assez souvent, mais il est, il est, il est débordé" et moi c'est mon cas, surtout au CMP et le CMP c'est gratuit, donc il y a beaucoup de personnes qui y vont. Moi je pourrais financièrement aller voir un psychiatre ou une psychiatre en libéral, mais le problème c'est que ce que j'apprécie dans le fait d'être suivie par le personnel soignant du CMP, c'est qu'ils font du lien avec l'hôpital psychiatrique puisque c'est mon CMP c'est la même équipe, enfin c'est les mêmes psychiatres en tout cas, qui sont qui séparent leur temps entre le CMP et l'hopital psy. Donc ils me connaissent moi, quand je vais à l'hôpital psy, ils savent, ils savent que j'ai fait un état mixte, ils savent quels ont été mes états thymiques au cours des derniers mois quoi, et ils ont mon historique sur papier.
Martha:
En termes de ressources? On les mettra sur la page du podcast.
Alix:
Déjà, il y a des groupes de parole, il y en· a dans plusieurs villes de France. C'est vraiment super de pouvoir parler à des personnes qui traversent les mêmes choses que vous parce que votre entourage comprend ce que c'est, théoriquement et émotionnellement bien sûr de leur point de vue.
Martha:
Mais pas en termes de sensation.
Alix:
Voilà, c'est ça. C'est pas le même vécu quoi. Parce que quand même, quand tu es bipolaire, tu te sens bloqué dans ton état, tu te sens victime de partir en état dépressif ou de mélancolie profonde.
Martha:
Oui, tout ça, c'est malgré toi.
Alix:
C'est clair. Donc groupes de parole. Ensuite, il y a deux pages Instagram que je recommande malheureusement qui sont anglophones. Alors ça je suis désolé, mais j'ai pas trouvé de page francophone qui me parle... Il y a un compte artistique qui s'appelle Bipolar Bear_art. Alors ça c'est beau! C'est une personne qui publie quasiment tous les jours des petits dessins et c'est d'une poésie infinie. C'est très très beau. Alors il y a peu de mots, mais moin ça me parle en tant que personne bipolaire. Même là, je suis émue. J'ai repensé à ce dessin très très beau. Ensuite, là, c'est que des mots par contre c'est AMBIKA Paul. Et là c'est des témoignages personnels que la personne met en images simplement avec des mots. Moi ça me touche également, ça me parle. En autre ressources, il y a les films dont j'ai parlé Humeur liquide et pour Ernestine, c'est des ressources filmographiques, ça se dit filmographiques? ou cinématographique. (Rire)
Martha:
Une filmographie. Oui, pourquoi pas.
Alix:
Des fois j'invente des mots et ça c'est pas en lien avec ma bipolarité. (Rire)
Martha:
Non, c'était en lien avec ton sens artistique et ta créativité. C'est plutôt pas mal, les mots sont faits pour être vivants.
Alix:
Après j'ai des livres, alors non site internet! Je vous ai dit tout à l'heure, il y a psycom.fr. Il y a également d'autres sites internet mais je me permets pas de les conseiller parce que j'ai pas je les ai pas lu en intégralité. Il y a trois livres que j'aime beaucoup, alors le livre number one c'est "GouPile ou face" qui est une BD, BD pédagogiques faite par une personne concernée, une personne cyclothymique en l'occurrence, mais qui explique également les autres types de bipolarité. Donc elle met en image une représentation de sa bipolarité qui est un petit renard. C'est poétique et c'est doux, je n'ai pas l'impression qu'il y ait des choses vraiment difficiles dedans. Et deux autres livres. Il y a "Dans la tête d'un bipolaire" de François Lejeune, écrit de la main de Juliette Lambot.
Martha:
Dont tu nous a expliqué que cela pouvait être difficile.
Alix:
Oui franchement... Alors ça peut être difficile à la fois pour les personnes bipolaires, mais également pour l'entourage, parce que quand on lit... c'est dur... Et avec tout le respect pour François Lejeune, parce que c'est son parcours et que c'est un warrior incroyable... Et bravo à lui! Moi je suis admirative du parcours, non seulement du parcours qu'il a parcouru. (Rire) C'est une répétition. De son parcours et aussi d'avoir eu l'immense courage de témoigner, de revivre toutes ses péripéties en les racontant à une journaliste qui a qui a mis à l'écrit, couché à l'écrit ce qu'il a pu lui dire. Ben cet homme est extraordinaire, clairement. Et puis c'est aussi aidant, moi c'était dur pour moi, mais je pense que c'est aussi aidant tout simplement de lire le témoignage d'une autre personne. Une dernière ressource c'est vous savez la collection "pour les nuls". Il y en a un sur la bipolarité. Alors je le présente comme ça parce que j'aime pas dire la bipolarité pour les nuls, parce que du coup c'est vraiment... Plutôt la bipolarité pour les warriors.
Martha:
Même les nuls c'est c'est celleux qui sont autour et qui comprennent pas, ce ne sont pas les personnes bipolaires,
Alix:
C'est ça. Et du coup, parmi les ressources. Et bien il y a les humains humaines qui sont des ressources en tant que telles, c'est à dire notamment le personnel soignan, les psychologues, psychanalystes. Moi personnellement je suis pas fan de ce type de suivi, mais ça peut tout à fait convenir peut être à d'autres personnes, mais surtout psychiatres. Parce que c'est le psychiatre qui va chercher, enquêter avec vous sur le bon, le bon régulateur ; et médécin traitant, moi elle m'aide beaucoup, j'ai de la chance d'être tombée sur un médecin traitant formidable... Les infirmiers psy. Je voulais aussi dire pour les étudiants étudiantes que, en autre ressource gratuite, il existe les BAPU, bureaux d'aide psychologique universitaire. Ça peut être intéressant à savoir parce que les CMP, comme c'est gratuit et que l'Etat évidemment ne met pas beaucoup les moyens dans la santé mentale, et bien les CMP peuvent vite être assez bouchés. On peut devoir attendre longtemps un rendez vous avec un psychiatre. Je ne sais pas s'il y a des psychiatres dans le BAPU, il y a tout au moins des psychanalystes et des psychologues. Mais voilà le BAPU c'est intéressant parce que c'est gratuit et que la bipolarité peut évidemment concerner des étudiants et étudiantes. Je pense avoir fait le tour des ressources que moi j'ai trouvé, mais il doit y en avoir plein d'autres et ça c'est chouette.
Martha:
(Soupir) Chère Alix, dis donc quel travail tu viens de faire !
Alix:
(Rire) Eh bien merci.
Martha:
Tu te sens comment après cet entretien ?
Alix:
Eh ben! Très heureuse ! Je pense que c'est aussi parce que je suis en phase stable et que du coup je suis capable de bien vivre ma bipolarité en ce moment. Mais du coup je suis très heureuse parce que je trouve ça important d'avoir fait ça. Et puis, ça me permet de témoigner de mon parcours et j'espère que ce sera éclairant, peut être pour d'autres personnes concernées. Que ça leur rappellera que si vous n'êtes pas actuellement en phase stable, vous allez, c'est sûr, y revenir. Et donc il faut s'accrocher.
Martha:
Il faut s'accrocher. Tu es une warrior c'est ce que tu nous a dit. Je voudrais juste faire un petit mot à ceux qui accompagnent notre vie ou celleux qui accompagnent notre vie, les parents et cetera. Oui, c'est sûrement très difficile pour vous et vous allez vivre vos phases d'adaptation aussi à un changement fort puisque la personne qui est en face de vous vit aussi ce changement. Donc acceptez aussi les étapes de votre propre changement. Mais n'oubliez pas que la personne qui est en face de vous et on l'a entendu avec Alix a conscience aussi que ça peut être dur pour vous... Mais visiblement ces personnes : "on a besoin de vous quand on est dans un trouble."
Orateur 3
C'est chouette, c'est vrai.
Martha:
Ok chere Alix, merci beaucoup de la confiance que tu nous a témoignée.
Alix:
Et bien merci à toi pour cette invitation pour réaliser ce podcast.
Martha:
A très vite au revoir
Alix:
Au revoir.
Martha:
Si vous aimez nos podcasts, vous pouvez soutenir notre travail en boostant les algorithmes. Vous likez, vous partagez les liens et surtout vous laissez vos commentaires sur les plateformes ou mieux sur notre site, sur la page du podcast que vous venez d'écouter. A bientôt ! On compte sur vous ! (Musique)
Éléments de références pour aller plus loin
Pour Ernestine, film de Rodolphe Viémont. Pour visionner le film / Ci-dessous le trailer
Pour Ernestine / For Ernestine - Rodolphe Viémont from Manifest on Vimeo.
Humeur liquide, être bipolaire
Sites :
Les BAPU, Bureaux d'Aide Psychologique Universitaires
Livres :
Dans ma tête de bipolaire, de François Lejeune
Les troubles bipolaires (pour les nuls)