La phobie scolaire : une souffrance réelle

Rédigé le 27/09/2019
Alice Fulcolor


Par cette Aqua-Réelle, Alice Fulcolor a recueilli le témoignage de Ganaël pour nous alerter du drame vécu par certaines personnes durant leur scolarité. Avec Alice, les larmes sont devenues couleurs pour mieux comprendre leurs peurs.

Voilà déjà 4 semaines que les cours ont repris pour la plupart des élèves. Certain·e·s vont tout faire pour s'en extraire poussé·e·s pourtant par le système éducatif, parent·e·s compris·e·s. La phobie prendra des formes diverses que la pression sociale voudra nier. Ecoutez celleux qui crient sans voix !

Temps de lecture: 2 minutes

 

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Témoignage de Ganaël, été 2019


Je voyais mon lycée partout. J’avais peur que la porte de mon appartement s’ouvre brusquement, comme ça peut arriver parfois en cours. J’avais peur de sortir de chez moi et de croiser les lycéen-ne-s. Encore aujourd’hui, deux ans et demi après, je ne serais pas capable de retourner dans la ville du lycée où j’étais en BTS Design. Toutes les rues de la ville me semblent être orientées vers lui. C’est ma mère qui devait faire 40 minutes de route pour m’accompagner chez le médecin puis pour aller porter mes certificats médicaux pour excuser mes absences, alors que j’habitais à trois minutes à pieds.
Pour vous faire une idée de ma souffrance : je n’arrivais plus à sortir de chez moi, je n’arrivais pas à aller faire les courses. J’étais en dépression profonde. Je passais toutes mes journées allongée sur le lit de mon copain, à fumer, à ne rien faire. Je ne pense même pas qu’on regardait des films ou faisait des jeux vidéos. Je me rappelle que, pendant cette période-là, je ne pouvais plus rien faire tellement tout était lié au lycée.
J’ai clairement subi de la violence de la part de l’équipe administrative. Le responsable de ma filière de BTS design-graphique m’a dit un jour « si en janvier tu ne reviens pas avec le sourire, il faudra penser à démissionner ». On m’a imposé un RDV hebdomadaire avec la proviseure adjointe. Loin de me rassurer, ça m’a très vite stressée-e. L’administration m’a obligé-e à voir un psychiatre car ielles estimaient que les certificats médicaux provenant de mon médecin traitant n’étaient plus recevables. Plus tard, lorsque j’ai demandé un mi-temps thérapeutique, appuyé par le psychiatre, le médecin scolaire m’a dit « tu pourrais prendre un peu sur toi » et je n’ai eu le droit qu’à quatre heures de moins par semaine ! Ils n’ont pas pris de gants et l’ont annoncé devant toute la classe, j’étais tellement gêné-e. Dès la deuxième semaine, le lycée m’a mis la pression pour que je revienne progressivement aux 4h de cours !
Aujourd’hui, j’ai du mal à me remettre à toutes les activités que j’étais amené-e à faire dans le cadre de mes études : que ce soit des opérations mathématiques simples à la boulangerie ou de la peinture digitale, ce qui était tout de même ma passion !
La personne avec qui je vivais, qui était dans une autre filière BTS de mon lycée, avait un handicap plus physique et peut-être plus visible. Les professeurs étaient bien plus compréhensifs à son égard, il était écouté, il bénéficiait d’un vrai suivi. Même l’administration agissait différemment avec lui ; moi je considère qu’ils m’ont harcelé-e. C’est comme si on ne reconnaissait pas l’existence de la phobie scolaire.